# Created 2024-11-27 mer. 02:38
#+title: 7d.nz
#+author: Phil. Estival
* • [2021-01-17 dim.] L'ingénierie numérique des débats                  :fr:
Désormais disponible en édition PDF, format livre de
poche IND.pdf.

./img/LePetitJournal.jpg

Faisant écho aux Ingénieurs du Chaos de Giuliano
da Empoli, « l'ingénierie des débats » qui se
présentait à son lancement comme un projet pédagogique
se transforme en une arène dans laquelle sont
remises en questions des recherches qui l'ont
légitimée et qui ont aboutie — à la place d'un
logiciel éducatif et collaboratif — à une
production des bureaucraties modernes,
aussi placée sur le « marché de la
concertation et de la démocratie », celui de la
startup nation, celle-là même qui promeut des
valeurs de réactivité et d'efficacité à leur
seules fins. Il est certain que pendant cette
période, nous avions durement manqué de lieux et
d'agoras où chacun venait s'instruire et
discourir : des lieux de débats.

Ce bureau d'études, lié à l'ingénierie des
systèmes et des plateformes, financé sur fonds publics,
sous accréditation scientifique et objet d'enjeux
politiques, est devenu, avec le temps, un poste d'observation de débats
publics et semi-publics,
regroupant des universités privées,
quelques collectivités territoriales et des
laboratoires scientifiques parfois en difficultés.
Des débats préparés et prolongés avec
des moyens informatiques eux-mêmes pensés, analysés, réalisés
et critiqués, ces étapes ne s'étant pas produites dans cet
ordre particulier ni pour un seul et même objet,
mais l'étude ici, porte moins sur l'informatique
que sur les soubassements idéologiques de l'entreprise
qui conduisent à mettre ces moyens en œuvres.
** Ingénierie des débats

À ses débuts et même si la dégradation de la classe
politique avait commencé, ce n'était pas le constat d'une
désertification du débat public qui justifiait cette
entreprise, mais l'expression d'un malaise lié à la
littérature scientifique, aux relations de travail dans des
laboratoires semi-publics et aux exigences de comptes-rendus
et d'évaluations ; pourtant de plein pied dans le secteur
toujours très encouragé des « innovations » digitales, mes
confrontations avec les bureaucraties, dont ont sait combien
elles procurent de l'ennui, ont eu ceci de néfaste que
passée la phase d'excitation pour la nouveauté, avec, sur la
partie visible, somme toute rien de renversant, il devint
difficile de préserver l'expression et la créativité,
valeurs pourtant essentielles aux partages de connaissances
qui serviront à concevoir intelligemment des programmes
originaux, surtout si on garde l'espoir de corriger les
erreurs fatales dont les productions précédentes nous ont
encombrées, pour combler les lacunes qui surviennent
lorsqu'est trop négligée l'histoire et plus simplement, afin
de poursuivre le travail que l'on sait faire.

En 2014, en pleine mobilisation pour défendre des
emplois dans l'enseignement supérieur et la recherche,
l'ingénierie — sous-entendue numérique — des débats —
concept original car on a pas souvent l'occasion de voir ces
deux mots ensembles (ingénierie et débat) —
est, à l'occasion d'un speed-dating scientifique,
présentée comme une vocation de se
positionner sur les trois domaines que sont l'éducation, la
science et la politique.
** Numérique, digitale
Arrêtons-nous un instant sur le mot numérique, car je
regrette ce mot qui évoque la loi du chiffre.
Je regrette qu'il soit partout, tandis
qu'informatique est tombé en désuétude.
Développeur ? Terme abstrait, au regard du polysémique développer
tandis
que programmeur était pourtant si exact.

Les mots nouveaux entrés
dans les dictionnaires d'une langue en proie à des
brusquements orwellien aident, tout en prenant la mesure du
temps qui passe, à identifier les incursions des
éditocrates, eux-mêmes mis en place et soutenus par les
ploutocrates, dans l'édification des comportements
langagiers.
Le cas de l'idiosyncratique et mal formé
« sociétal » — expliqué par le linguiste François Héran
Heran91societal — évoque à lui seul le
glissement qui s'opère à même le sens.  Social, en
latin socius, compagnon, associé, allié, correspond à
société, à la vie en société.  Tandis que sociétal est
relatif à la structure qui englobe l'individu pour lui
imposer sa conduite. Une entité autonome et
supra-individuelle, substituée au tissu social.

Parmi ceux qui ont critiqué le substantif numérique, il a
eu Alexandre Moatti Moatti12 et Bruno Latour — ex-directeur
scientifique à Science Po — qui citait Simon Seifer :
« l'erreur que vous avez commis en France, c'est de
l'appeler numérique, il fallait rester au mot français
“digital”, que nous vous avons nous les anglais disait-il,
emprunté[fn:digit:/digit n./ (number: 0-9) : chiffre nm.].
Mot qui existait en 1730, il a été
réutilisé par les anglais et réimporté en 1960. L'académie
des sciences dit non, c'est un anglicisme, nous allons
l'appeler numérique. Pourquoi Seifer insistait là dessus ?
Dans digital, il y a les doigts [qui pianotent sur] le
clavier. » « Ce que vous appelez une révolution numérique
c'est que vous tapez sur un clavier un truc complètement
[...] provisoire dans l'histoire des techniques, un objet de
transition dont on attend la fin avec impatience
SoftPower-2020-02-23. » Très polémique, la remarque de Latour a ceci
d'utile qu'elle met en relief la confusion qui existe dans
les manifestations de la révolution numérique, en essayant
tour à tour d'appareiller les objets de l'extension
cognitive, l'écran, le clavier et pourquoi pas le
télégraphe... et ordinateur et machine de Turing.  On se
dote d'une bien meilleure perspective anthropologique si on
observe le rapport à l'écriture et à son media et à la place
qu'elle occupe dans les empires.


Sur une remise en question étymologique, on peut
remonter encore avant, à la révolution digitale, celle qui
commence lorsqu'on se met à coder, avec ces doigts, des
alphabets. Codex désigne en latin une tablette pour écrire.

Précédemment,
dans les émissions Hors champs et Place de la Toile,
sur France Culture,
il remarque que « L'ordinateur
attire très peu de philosophie des sciences et de l'histoire
des sciences. »
« On accepte au fond l'idéologie dématérialisée, alors
que c'est au fond toujours re-matérialisé. »
Mais quoi ? La musique ? Les bibliothèques ? Certains emplois ?

En septembre 2019, sur les régimes de vérité
ethnographiques : « La recherche des modes et de
juxtaposition de vérité en philosophie étant un des moyens
d'éviter que l'un de ces modes ne prennent le pas sur les
autres [religieux, scientifique, juridique ou politique].
La notion de mode est importante [ici].  La qualité de
l'information en science est d'une certaine qualité qui est
propre au mode. » Le mode distingue les manières d'être de
quelque système et n'est pas à confondre avec une
“modalité” (Un sens faible pour un terme passe-partout et un
sens spécialisé de manière relativement arbitraire à partir
de la tradition logique, dans les usages linguistiques. Mais
il y a de fréquentes interférences entre les deux » TLFi]).
Je le clarifie car il occupe une
place dans la grille d'analyse logique des énoncés, tout en
laissant planer un spectre : celui de la définition formelle
de la vérité.  Car au-delà de l'exercice de logique, il
n'existe pas dans les sciences, malgré tout ce que proclame
la physique,
de réponse ni adaptée ni objective à toutes les circonstances.
Cette qualité de l'information en science est donc avant
tout une question de communication, communication qui,
il est nécessaire de la rappeler,
fait partie de la mission scientifique, mais mise à mal
par le règne de la quantité sur celui de la qualité.

La suite dans les idées, en 2012 : « à cause de la théorie
que les gens ont, on a envoyé l'anthropologie à l'étranger à
part des travaux tout à fait récents de Descola et des
autres, on a assez peu ramené l'anthropologie sur nos
propres terrains.  La base qui permet de comparer les non
modernes ou les pre-modernes ou les hyper-modernes ou les
neo-modernes reste très fragile. Puisqu'on attribue des
défauts ou des qualités qui n'ont jamais été finalement
tellement vérifiées sur le terrain. »

Des observations des « modernités » qui ne sont pas permanentes
et fragiles. Comme le sentiment de vivre
les expériences de la modernité,
elles se passent maintenant.
D'autres observations et des vérifications qu'il
est possible de faire au lointain ne sont-elles pas aussi
une voie d'exploration de civilisations plus stables,
moins mutantes, pour aussi se doter d'yeux neufs et mieux
ouverts sur son propre terrain ?


« Les sciences studies ont été les premières à faire
des études un peu empirique sur la façon dont les sciences
se passaient (de l'anthropologie en fauteuil jusque-là).
Stupéfait que sur les projets techniques, les études
se comptaient sur les doigts des deux mains
(idem pour l'ethnographie de la fabrique du droit).
La connaissance des institutions qui produisent
de l'économie reste extraordinairement lacunaire
parce qu'on est obsédé par les guerres de religions
au niveau idéologique entre le marché, l'État et toute
ces choses qui ne correspondent pas à des pratiques.

La notion de valeur est extrêmement simple : si vous
restituez à quelqu'un une description de ce qu'il
fait, vous ferme-t-il la porte à la figure ou pas ?
Dans l'anthropologie à l'ancienne,
c'était moins vrai : ce que disent les gens
de ce que vous dites d'eux ne paraissait pas aussi important
mais maintenant — l'anthropologie elle-aussi est devenue réflexive —
c'est beaucoup plus important.
Les valeurs sont une définition de ce à quoi on tient,
[et à défaut, de quoi nous ne sommes plus nous-mêmes]. »

Pourquoi est-ce que j'insiste sur l'intervention
de Latour ? Ses ouvrages avaient été convoqués
par notre groupe de travail dès la souche de notre
collaboration, mais de manière vague, lors
que surgissait l'édition numérique de
son Enquêtes sur les Modes d'Existences,
qu'il aurait été honnête de s'y confronter
et que nous réalisions une édition en ligne
équivalente voire complémentaire par bien des aspects.
Alors qu'est-il arrivé au juste ?

#+name: fig-dialo
#+caption: le premier écran de /Dialoguea/ : pour déposer un commentaire
#+caption: dans le forum il faut d'abord sélectionner un extrait du texte
#+caption: auquel le commentaire fera référence.
file:img/2014-12-03-dialoguea.png
*** Expérience d'une pédagogie renouvelée de l'argumentation
Cet écran
montre la première
maquette de Dialoguea.  Le logiciel procure un surligneur de
texte qui indique sur quoi porte le message qu'un rédacteur
rédige dans le forum, faisant référence au texte principal
ou à un commentaire précédent.

Apprendre le débat et développer une pensée critique font
partis des missions de l'école et pourrait-on ajouter de
chaque citoyen.

Véronique Pinet, professeur de philosophie au lycée Joliot
Currie à Sète a imaginé ce projet éducatif avec Jean
Sallantin, chercheur en logique.  Ce premier mockup de
l'interface était réalisé par la société Intactile Design.
Il résume l'idée,
et celle-ci me paraissant bonne, je me suis lancé dans sa
programmation qui devint une plateforme, cependant même que
l'emploi du terme apparaissait.

La première expérimentation a lieu dans des classes de
littérature et d'histoire‑géographie.  Les élèves lisent et
commentent deux articles du Monde sur l'écologie de la Mer
Méditerranée — un sujet qu'ils connaissent bien — et une conversation
imaginaire entre deux habitants de Sète rédigée par leurs
enseignants[fn:Jolliot:https://dialoguea.fr/forum/map/5ad140f49f50ea064c061063].


Deux groupes de vingt élèves débattent pendant deux séances de
trente minutes par ordinateurs interposés ; ajoutons la mise en
place et l'explication pour l'organisation par paires dans la
salle de TP. En autonomie de lire et de
collaborer dans un forum, ils sélectionnent (soulignent)
les extraits qu'ils commentent (annotent) tout en discutant avec
leur binôme.  L'activité ne fait pas l'objet d'une évaluation. La
restitution nous indique que l'exploration du sujet qui a été
proposé a bien fonctionné.

Ayant résumé chaque propos en quelques mots, ma synthèse
tient sur un poster mais cette restitution des débats n'étant
pas le travail de leur élèves, elle n'intéressera aucunement les
enseignants.

Pour la suite l'ambition des organisateurs sera de créer une
relation à partir d'une question : « d'où vient-il que le
climat ne doit pas dépasser un seuil fatidique de
réchauffement moyen de 2° ? ». Nous sommes en 2015.

Les enseignants n'ont probablement pas la réponse à cette
question. Il était proposé que des étudiants interviennent
au lycée, qui n'ont pas davantage la réponse, mais seront, eux,
en capacité d'aller interroger des chercheurs dans les
laboratoires de leur université pour la rapporter ensuite
auprès des lycéens, créant ainsi ce lien entre lycéens
futurs étudiants et étudiants futurs chercheurs.
Vision assez optimiste des choses, les arpenteurs
de couloirs se font plus rares et les bâtiments ouvrent
des voies d'accès de plus en plus restreintes.


Au printemps 2015, se tiendra une grande journée où des
classes de quatre lycées se rassemblent à l'Université des
Sciences et Techniques du Languedoc et présentent
mutuellement un projet pédagogique original auquel ils ont
activement participé. Deux classes
ont un vrai débat en bonne et due forme, présenté et
animé par les élèves eux-mêmes.

Sur l'expérience avec le logiciel, l'avis des
enseignants est très positif, y compris pour ceux qui étaient au
départ méfiants. Pour comprendre qu'ils soient
rendus réticents à ce type d'initiative, il faut avoir
entendu leur témoignage,
ceux
des ingénieurs contractuels qui ont eu à y travailler,
et celui d'une inspectrice de l'académie
pour comprendre les difficultés
quotidiennes produites par l'usage des services centralisés
de l'Environnement Numérique de Travail (l'ENT)[fn::« La menace
qui pèse sur les informaticiens, c’est le conservatisme,
encouragé par les fournisseurs, on comprend qu’ils n’aient pas envie de
voir remises en cause des compétences qui ont mises des années à être
acquises, mais dans un secteur en évolution rapide, le conservatisme
est suicidaire à terme, même si la croissance rapide du secteur peut en
masquer les dangers. » Bloch13].

Ce que je traduis par la mise en œuvre d'une société de la panne.
Bien au fait des politiques en matière de plateforme
pédagogique, l'un d'eux ajoutera : « tel quel, Dialoguea
est très bien, inutile d'en rajouter ». Et on comprendra
mieux ce qu'il anticipait par la suite.


La presse locale a commenté positivement l'expérience LaMarseillaise-2020-02-02.
Ne resterait plus qu'à rassembler quelques fonds pour conclure
par une phase, même si ce terme est un peu fort,
« d'industrialisation » avant de poursuivre en direction des
nouvelles expériences issues des recherches apportées
entre-temps à notre connaissance...

Ici vont se croiser deux politiques : celle des laboratoires
dans des université en transformation avec l'apparition des
COMUEs[fn::Les Communautés d'universités et établissements,
mises en œuvres sous le ministère Fioraso en 2013.
https://histoiresduniversites.files.wordpress.com/2020/03/urca-regrouper-dégrouper.pdf]
et celle du rectorat de l'académie, les
deux directement dépendantes du ministère de l'éducation.
Le logiciel continue de faire bonne impression, assez pour
que le rectorat accrédite symboliquement l'association et
promette de soutenir le projet. Tout juste de quoi alimenter
à nouveau trois mois de développements, d'administration et
de formation qui vont suivre, mais ceci est largement
compensé par des promesses.
Laboratoires et universités sont des lieux
privilégiés de la politique car le scientifique a le devoir de
transmettre des connaissances et pour cela de communiquer,
d'informer et d'instruire tandis que le politique a besoin
d'être entouré et informé pour anticiper, prévoir et
prévenir. Avec de l'argent au fond du panier les premiers
crabes sortent du sable pour espérer aller au soleil.
**** Visualisation

J'expose rapidement la nature des relation établies au moyen de
cartes mentales : j'utilisais au début une arborescence
linéaire pour décrire les conversation d'un forum
or selon la “profondeur” de la discussion,
celle-ci déborde du canevas.
Les replier circulairement
sur des diagrammes en soleil (sunburst en anglais)
maintient la localité du
graphique schématique de l'arbre de la conversation,
ce qui a ouvert la possibilité
de les disposer à leur tour sur des graphiques
et de les relier entre eux par des arcs.
Une présentation
originale
que l'on appela par la suite des cartes de débats,
qui aident à s'orienter dans les forums, à se faire
une idée de la participation sur chaque et identifier les
points d'achoppements.
Vues certes synthétiques et
schématiques, mais beaucoup de temps peut être dépensé à
disposer les graphes, les réarranger, les organiser, les
aligner, pour en définitive faire tenir cette information dans
un espace d'exploration raisonnable mais limité,
relativement comparable aux dispositions
de pastilles sur des tableaux. Un éditeur
de dessin vectoriel embarqué dans le programme
et pouvant absorber ces graphes et d'autres informations
issue des données aggrégées viendra par la suite
en complément ouvrir des possibilités de présentation
créatives.

#+name: fig:sunburst
#+caption: Une centaine de messages colorés d'avis favorables, défavorables ou neutres,
#+caption: en réponse les uns aux autres.
#+caption: Les messages du premier cercle font directement références
#+caption: à un passage du texte sélectionné et cité.
file:img/sunburst.png

Une organisation chronologique, journalisée de l'information
offre une sédimentation illimitée, déjà structurée, possiblement
non labile, graduellement indexable,
Le texte écrit étant le référentiel ultime,
ce qui est loin d'être le cas des documents et des tables
dans des bases de données.


#+latex: \newpage
*** Réflexions sur le débat numérique

#+begin_verse

« Qu'il est utile, Ô Athéniens,
  qu'il est bon d'avoir des archives publiques !
  Là, les écrits restent fixes
  et ne varient pas selon le caprice de l'opinion. »

     Discussion d'Eschine contre Ctésiphon


#+end_verse



Certains débats, scientifiques, théologiques ou
philosophiques, conduisent réflexivement à se questionner
sur la dimension savante du débat tenu.  Nous ne remettrons
pas en question la pratique du débat telle qu'elle existe,
civilisée et ordonnée, mais nous nous intéressons à ses
extensions informatiques : d'une part au web et aux
plateformes centralisées. De l'autre, à un système
d'exploitation distribué avec un modèle de communication
proche du mail et du journal personnel. La situation
est ambivalente du fait que coexistent deux systèmes
d'exploitation dans les ordinateurs en 2020 : le système
d'exploitation proprement dit, standardisé et robuste ;
et le navigateur web, qui réimplémente en différent lieux
des applications en réseaux.

Dans la première configuration, désormais très classique,
nous fournissons une interface dont la fonction centrale est de
pouvoir annoter des textes sur le web.

S'il était ouvert pour offrir à chacun la possibilité
de produire ses propres lieux de discussions,
il serait un forum des débats, mais ça n'est pas encore
le cas, ce qui en fait à ce stade un logiciel d'intermédiation et devenu, plus loin,
un logiciel « de collecte de la parole citoyenne », soit
un instrument de plus pour le politicien.

Dans la seconde configuration, la situation est tout
autre : nous allons en direction d'un authentique assistant
cognitif bâti autour du principe d'un système de fichiers
irrévocables Douzal.Bercher.duColombier.2011.  Une
notion essentielle est ici que chaque participant doit pouvoir
disposer d'une copie intègre du texte à partir duquel il
débat.

Axé sur les données,
il entend généraliser ce principe,
à partir des principes de l'écriture, à un système d'exploitation —
la définition de celui-ci Saltzer&Kaashoek
étant l'ensemble des programmes qui permettent de réaliser son travail
et non plus l'interface de parité logicielle/matérielle que l'on avait
coutume d'utiliser.

Assez naturellement, on conviendra
que le principe se réserve en premier lieu à un usage personnel.
Je procède à une annotation, j'écris un commentaire,
l'évalue, pondère, modère ou enflamme le propos
avant de le pronnoncer, l'écrire, l'envoyer, l'adresser publiquement.
La datation, la conservation et l'attestation patrimoniale,
qu'il ait été partagé
ou non n'est plus une intendance de l'auteur.
Si on est assuré que l'auto‑coopération se passe
correctement, c'est à dire au premier niveau, que le commentaire
des notes que je rédige afin de me les
transmettre vers le futur fonctionne, les chances que l'on puisse
coopérer évoluent elles-aussi. Il s'agira à partir
de là de retransmettre et d'identifier sur le réseau.


Transmettre n'est plus un problème,
identifier en est un autre, l'anonymat
sur le web en ayant fait un bal masqué
permanent.

Il sera toujours possible de se faire passer pour un autre
et ceci est en lien avec la notion d'expression libre.
Les résistants à l'occupation parvenaient à sauver
des vies en falsifiant des passeports pour créer
temporairement des identités que les autorités
identifiaient, elles, commes formellement autorisées
à circuler. Un système qui entend réaliser des applications
trop aigües de formalismes, soient
des ensembles de règles, peut se retrouver lui-même
privé des moyens de se soustraire
à ses propres dérives.

L'informaticien est aussi tenté
de voir en la corruption du noyau Linux,
non pas une métaphore ni une virtualité, mais
un échec direct et immédiat d'une entreprise
démocratique
pour maintenir un cadre
exécutif, législatif et juridique au service du
peuple.
Et cela peut aider
à comprendre la nécessité impérieuse d'une
sécurité des échanges d'informations
et de stockages irrévocables et horodatés.
Cela ne prémunit en rien d'une falsification,
mais ceci assure que sa trace
puisse être conservée et étudiée
et que les états courant du systèmes puissent être restaurés
dans des états précédents.

Ce stockage et cette distribution nécessitent des modèles de
programmation différents des standards et de la pop-culture
du web. Ça n'est en rien incompatibles : on tient à continuer
à travailler sur de l'hypertexte et on est libre de transmettre
sur http la vue des données et le sens que l'on prête aux informations.

Au bout du raisonnement, si on accepte que l'intégrité de la
copie d'un texte sur lequel on débat puisse être mise en
cause, on pourra aussi en toute naïveté, se demander si tous les
hommes sont égaux ou si certains le sont plus que d'autres.
**** Peut-on espérer faire société sur les grands networks ?
Tels qu'ils en sont venus à exister ?

Le logiciel libre se présente comme un modèle d'organisation sociale
démocratique.
On peut faire le parallèle avec
l'amendement et la transformation de textes de loi
avec ou en dépit d'un débat en bonne et du forme CodeIsLaw.
Cela se lit et peut être rendu explicite :
quand et comment les textes sont modifiés.

Ouvrons une parenthèse sur l'informatique.
Le web abonde de forums et Dialoguea est un tel forum,
codé avec les langages en vogue en 2015, période qui voit
l'arrivée à maturation de la norme EcmaScript comme standard
pour les navigateurs, offrant des expressions
de programmation fonctionnelle, généralisée avec
Typescript[fn::Sur l'écosystème Javascript, il faut rappeler qu'après
 l'acquisition de github par Microsoft pour 7,5 milliards de dollars
 en juin 2018, suivit celle du registre npmjs en février 2020.  La
 situation est exposée dans Silverio:2019.] et
 JSON (Javascript Object Notation)
comme format d'échange et qu'un dialecte singulièrement
voisin de Lisp émerge de la combinaison des trois,
ce qui s'explique probablement par
la dixième loi de Greenspun[fn::https://wiki.c2.com/?GreenspunsTenthRuleOfProgramming](1993)
sur la programmation.

Les langages conçus pour la programmation des navigateurs web
ont occupés une place de plus en plus importantes au point de se
substituer aux systèmes d'exploitations.
Ils sont restés longtemps notoirement peu sûrs,
et fruit d'un mode de distribution
qui entendait offrir quelques garanties quant à
la simplicité et l'isolation
des systèmes hôtes,
mais pas la sûreté des programmes eux-mêmes.

La tendance est très
marquée et on peut résumer l'une des conséquences
à cette citation de Robert Pike :
“Systems software research is irrelevant”[fn::https://news.ycombinator.com/item?id=8651125]
pike2000systems.

On peut opposer que le navigateur Chrome est du même ordre de complexité
qu'un système d'exploitation Grigorik et qu'il sert
précisément à en concevoir un (le chromeOS),
mais là n'est pas la question,
les systèmes fermés produits par des firmes
ne venant pas à manquer.

Pour le programmeur la situation s'est
relativement améliorée avec le transpiler
Babel.js qui permet de composer des modules,
une étape transitoire vers TypeScript pour
disposer d'un typage intermédiaire et enfin JSX,
offrant de nouvelles possibilités pour créer des
structures algébriques entrant dans la
composition des interfaces Sinclair20.

Tout ceci se passe, paradoxalement, au prix
de la dépossession des usagers de leurs données.

Microsoft et Palantir soutiennent le devenir de TypeScript
et entendent aller en direction d'une généralisation des
systèmes au web, c'est à dire une vision de l'informatique
majoritairement réduite au smartphone et en situation de
dépendance vis-à-vis de fournisseurs, le système placé
derrière une vitre.
Ce langage
pourrait légitimement exister avec un compilateur
qui lui soit propre, mais ça n'est pas le cas : il est conçu
pour s'adapter à l'état actuel des interpréteurs dans les
navigateurs, à leur charge de
fournir un compilateur assez sûr pour assurer ce
mode de distribution des programmes, dont on ne peut garantir
s'ils seront encore opérationnel dans dix ans.
Tous les systèmes embarquent des composants logiciel d'une
complexité supérieure pouvant fonctionner H24, sans erreur
aussi longtemps que l'électronique le supporte. Et c'est ça
que le développeur veut et c'est pour cela que nous
avons des ordinateurs, c'est à dire des machines déterministes
à notre service. Personne ne souhaite édifier
des aliénations qui iraient dans le sens inverse.
**** Inciter à la discussion en ligne
sur des sujets propres au
choix informatiques et au développement du projet lui-même,
voire, dès le début, sur le code source et ces commentaires
en plein texte aurait été perspicace.

Les choix effectués pour l'organisation de logiciels libres
peuvent impliquer plusieurs tours de discussions avant de
décider de ce qui devra être fait et dans quel
ordre. Davantage encore dans le cas de logiciels libres à
large diffusion.
En ceci,
appliquer l'adage
« To eat your own dog food »
apporte de la cohérence à l'élaboration de
l'ensemble[fn::On a pu imaginer à un stade que cette
relation se nouerait avec communecter.org, mais pour des
raisons de maturations technologiques et soucieux d'élaborer
un groupe de travail local,
je reportais ce rendez-vous qui, par la suite, (et bien que je me sois
rendu dans l'autre hémisphère dans le but de rencontrer son instigateur)
n'arrivera jamais.].


Le parti pris a été de se tourner très tôt vers le grand
public, de simplifier, de masquer et de faire disparaître
toute technique,
cependant que dans le laboratoire,
on ne tolère que les belles lettres de noblesses :
chercheurs en IA, designers d'usages,
chercheurs en analyse automatique
du langage naturel et didactiques des sciences.
Mais la collaboration ne se produira pas, le débat n'émergera
pas car sa condition première ne sera pas rencontrée : accepter l'altérité
et reconnaître que nous concevons un système techicien.


Le choix d'aborder le problème comme une théorie — car c'est
ainsi que les choses ont été présentées à leurs débuts — dans un
contexte quasi identique, a déjà été remis en questions
par Edward Barrett, dans The society of text, en 1989 Barrett1989.

« Mon travail sur le développement du Système
Éducatif en Ligne [NdT : Educational Online System (EOS)]
au MIT démontra encore plus sa valeur dans la perspective
d'une construction sociale du point de vue de la conception et
de l'implementation de technologies élaborées pour
l'enseignement et les conférences.

Pendant plusieurs années, nous développions un système
pour enseigner l'écriture qui tirait parti du réseau
Athena et discutions au sujet de l'application de
l'IA pour écrire des instructions et créer des documents.

Diverses théories des processus cognitifs de l'écriture
et du développement, dérivées de Piaget et d'autres, furent
suggérées comme modèles pour un prototype de machine mais
les membre du Programme Écriture ne se sentirent jamais
très à l'aises avec ces théories.  Ou peut-être est-il
plus correct de dire que nous ne pûmes jamais accepter en
bloc les théories que ces systèmes impliquaient.  Il
était de plus difficile de concevoir comment certains de
ces programmes que nous essayions de stabiliser
pourraient être intégrés dans les activités en temps réels
des classes d'enseignements.


Au lieu de tenter de définir un modèle hypothétique de
l'esprit humain que nous aurions personnifié dans ces
ordinateurs, nous avions défini les actions qui prenaient
place quand l'esprit était engagé dans le processus de
créer, d'analyser, de partager des textes. C'était la part
de travail interne de l'esprit qui n'est pas calqué sur la
machine ; au lieu de cela, nous concevions la classe comme un
“mécanisme” d'interaction et de collaboration et décrivions
ces processus sociaux sur l'ordinateur. Par essence,
nous avions textualisé l'ordinateur. Nous le fîmes entrer,
— et l'utilisions pour assister les processus historiques et sociaux
que nous présentions — pour soutenir la production des textes
dans n'importe quel environnement de conférences instructives. »


Dans notre cas, si, en 2014, les fondations épistémologiques
présentaient, à ma connaissance, des facettes encore
inexplorée de la logique — le domaine est vaste — elle n'en
était pas moins difficile à accepter en dehors de leur
simples productions culturelles[fn::
Plus difficile encore, l'explication de l'un des membres du
projet «AREN» désigné comme product manager ; Au cours
d'une des conférences d'un cycle sur l'IA en Mars 2018 :
« nous essayons de recréer le cerveau humain ».
Une vision particulièrement rétrograde
car plus personne ne pense ainsi depuis les années 60.]
 comme de
potentielles théories fondatrices sémiolo-informatiques.
Les explications d'un modèle de partionnement des espaces
fabriqués par de très grands vecteurs de mots servant à
calculer des distances (arithmétiques) entre des phrases
tiennent en un quart d'heure, malgré cela, elles ne firent
jamais l'objet d'ouvertures à de nouvelles discussions qui
auraient pu à leurs tours être fertiles.



Les réflexions sur un programme de débat numérique à deux
colonnes, avec le texte d'un côté avec une marge
d'annotations et les commentaire de l'autre amènent
plusieurs remarquent sur l'intertextualité.

#+latex_header: \setlist[itemize]{label=$\bullet$}
En dehors du fait que deux colonnes ou deux pages soient une bonne
configuration de travail — configuration que l'on retrouve aussi
dans les gestionnaire de fenêtre en mozaïque (tiled window manager),
qui privilégient un partitionnement régulier de l'espace et dans lesquels
le travailleur cognitif ne perd pas son temps à réorganiser des boîtes —
le programme présente des ressemblances
accidentelles avec le memex de Vannevar Bush Bush45.
Ces réflexions et son anticipation sont toujours d'actualité
que ce soit sur les questions d'interactions,
d'enregistrements et de partages des textes.
Outre-atlantique les développeurs du projet hypothes.is,
tout en démontrant leur capacité à s'organiser collectivement,
communiquèrent à la une de leur site, un dessin animé présentant
le memex, une indication de leur prédisposition intellectuelle
et de leur connaissance de l'histoire.

Et la situation est encore plus tangible tandis que je rédige ceci,
en (r)assemblant les sources et les commentaires avec l'aide
du vénérable et indestructible Emacs.

Il y aurait tout un propos à déployer ici pour expliquer
en quoi l'informatique est du texte, en quoi le texte
se distingue de l'écriture, et en quoi nous aurions tout
à gagner à se doter de mémoires véritables qui effectuent
des écritures. Nous y reviendrons avec le démonstrateur.
*** La preuve

La science se décline en aptitudes et savoirs,
en connaissances collectives et en connaissances individuelles.
Le savoir scientifique mis en partage c'est déjà de la science.

Or la question de la preuve ne porte pas tant sur l'existence de la
vérité, que des critères qui permettent de l'établir.
On ne peut pas définir formellement la vérité, ainsi
que la diagonale irrationnelle du carré des pythagoriciens
ou la démonstration de Russel sur les ensembles nous l'indiquent.

Cela ne veut pas dire qu'il faille abandonner toute
tentative de description formelle, loin de là,
puisque dans la plupart des domaines scientifiques et
technologiques, les notations formalisées en mathématiques
et en logiques se sont prouvées indispensables à la formulation
précise de concepts et de principes et au raisonnement effectif.
Mais il faut bien garder en vue que son appareillement avec les affaires
humaines ne seront qu'occasionnelles : le débat,
ça n'est pas des maths mais du discours,
de la didactique, de la philosophie, de la politique et de la culture.
Les savoirs peuvent être réactualisés, de petites causes
ayant de grands effets et des socles de connaissances
peuvent être remis en questions au regard de nouvelles
connaissances.

« Un savoir scientifique a sa vérité prouvée par une
confrontation à la réalité et sa validité prouvée par sa
cohérence formelle. »

Basée sur le carré d'Aristote et ses extensions, Jean Sallantin
propose six formes de preuves pour définir les controverses ;
Sur les propriétés des choses, les preuves vont porter sur le fait
qu'une chose a une propriété
permanente si elle a une durée dans le temps. Cette propriété est
déterminée si on arrive à la mesurer,
existante si on arrive à la localiser ;

Sur les propriétés des énoncés, les preuves vont porter sur le fait qu'un énoncé soit
saisissable car non contradictoire,
décidable car vrai ou faux, ou encore
ordonné car s'inscrivant dans un ensemble de relations avec d'autres énoncés. »

#+name: fig:30hypostases
#+caption: Propriétés des énoncées : réfuter \ prouver
#+attr_latex: :font \normalsize :float sidewaystable :placement [H] :align |l|c|c|c|c|c|c|

|---------------+-----------+----------------+-----------+---------------+------------+------------|
|               | ordonné   | déterminé      | décidable | saisissable   | existable  | permanent  |
|---------------+-----------+----------------+-----------+---------------+------------+------------|
| ordonné     | -         | classification | aporie    | approximation | paradoxe   | formalisme |
|---------------+-----------+----------------+-----------+---------------+------------+------------|
| déterminé   | variance  | -              | variable  | phénomène     | indice     | donnée     |
|---------------+-----------+----------------+-----------+---------------+------------+------------|
| décidable   | hypothèse | définition     | -         | méthode       | problème   | théorie    |
|---------------+-----------+----------------+-----------+---------------+------------+------------|
| saisissable | principe  | paradigme      | objet     | -             | domaine    | loi        |
|---------------+-----------+----------------+-----------+---------------+------------+------------|
| existable   | mode      | variation      | dimension | événement     | -          | croyance   |
|---------------+-----------+----------------+-----------+---------------+------------+------------|
| permanent   | axiome    | valeur         | structure | invariant     | conjecture | -          |
|---------------+-----------+----------------+-----------+---------------+------------+------------|


Le tableau des intersections
entre ces six propriétés établies ou non
se remplit de 30 nouvelles définitions
destinées à être utilisée pour annoter un texte,
et supposément serviraient de bases
d'apprentissage à un programme supervisé, mais les recherches
ne vont pas jusque là.

Dans ce monde Habermassien, où ne prévalent que les normes de
la vérité et du meilleur argument, peut se décréter que l'espace
des catégories d'arguments fondés qui ne sont pas des
déductions est fini.  Ceci exclue la créativité qu'offre le
langage et procure un modèle statique dans lequel tout se
tient d'emblée par une chaîne de relations et de
notations. Dans un tel modèle ce qui peut être déduit l'est
déjà d'emblé et rien ne peut arriver.

Si l'on se place dans celui où le savoir et le dire peuvent en
général vous valoir quelques avanies et quelques déconvenues,
c'est à dire celui où nous sommes, on peut
observer une distinction sur le réel, car c'est de cela qu'il s'agit
en premier lieu : de s'y confronter ; les objets qui le
peuplent appartiennent soit à l'espace factuel, l'univers de
l'expérience naturelle physique et sensible auquel nous
avons accès, soit à l'espace formel, celui de la pensée
rationnelle et logique. Comprenons par là qu'aucun évènement
naturel de l'espace physique (ou factuel) n'a d'influence
sur un problème posé dans l'espace formel. La relation
inverse, en revanche, existe.  Ainsi une éruption du
Krakatau, aussi violente soit-elle, ne changera jamais le
fait que dans une situation donnée il existe un échec et mat
en trois coups.

Mais au bord du volcan en éruption, cependant,
la partie d'échec est hors de propos et n'a pas lieu.
Le débordement du cadre mathématique ouvre la tentation
de présenter ceci comme les promesses d'un système de
démonstration formel de la vérité, ce qui apparaîtra aux
plus lucides comme un horizon aussi sinistre qu'une loi sur
les Fake News.
#+latex: \newpage
*** Appel à projet

L'appel à projet e-fran porté fera l'objet du projet
ARgumentation Et Numérique dit « projet AREN », projet dont
j'ai été nommément écarté après avoir expérimenté
et validé le programme dans les établissements
et que j'en eu délivré un code source sous licence AGPL,
dans l'espoir d'obtenir le soutien du laboratoire.
Projet honni donc, qui, au dialogue a substitué l'image
d'un pouce renversé sous les huées, tandis que son devoir de
répartition des financements va poser problèmes.

La fraude commence avec un article paru dans le Midi-Libre
midilibre16.5.16. Cette même photo[fn:: https://dialoguea.fr/forum/debat/5acc867f7999044dc378f0bf]
au bandeau coupé est accompagné d'un texte qui attribue à bon
compte le travail réalisé, renommé et maquillé, piétinant
allègrement le respect du droit d'auteur.  Son responsable
après avoir multiplié les efforts pour écarter l'auteure initiale,
Véronique Pinet, prêtera le flanc à une invitation au
tribunal administratif en attribuant un poste non à qui de
droit mais à sa propre ex-thésarde.


On retrouve encore l'impétrant dans une tribune
Rétoré17
sur la logique et le langage
dans laquelle
il est loisible de chercher les erreurs.
Le propriétaire de ce doigt tendu devra néanmoins le ranger
l'année suivante ; Initialement nommé porteur du projet,
mais ne souhaitant ouvertement pas se réduire à n'être
qu'un prête-nom, il sera démis de ces fonctions après
diverses tentatives pour en écarter les instigateurs.
Le financement confirmé, notre « consortium » peut mettre en
place comités de direction et de pilotage, bureaux,
organisateurs de colloques, plus nombreux que le personnel
affecté à l'ouvrage et se donneront des réunions régulières
pour faire le suivi de deux thèses
Pallarès19,DeChechi20. Fort bien. Puisqu'il c'est ce
qu'il faut désormais pour espérer financer la recherche.
Mais alors, pourquoi ne laisse-t-on pas les deux ingénieurs
collaborer à une entreprise commune, ouverte et libre ?

Tout l'enjeu sera, dans la phase où est rendue possible la
budgétisation, de favoriser un mode d'organisation
hiérarchique et pour le chercheur émérite de poursuivre ex
officio.  Les critiques sociales de la bureaucratie
Kursh.1971,bloch2005systemes,Graeber2012OfFC ont trouvé
là leurs illustrations dans ces réunions devenues le
rendez-vous régulier de quelques-uns, en charge de
superviser le travail des autres et en plus grand nombre
qu'eux.
*** La censure pardonne aux corbeaux

Reste enfin à préciser que l'enjeu majeur du projet AREN est
d'exploiter les IA promises par le laboratoire,
pour, en consommant de suffisamment grandes quantités de données
produites par nos chères têtes blondes,
espérer produire un agent conversationnel (un chatbot) et identifier si un
texte écrit par un élève est trop court ou trop long ou
copié-collé afin de “cadrer” automatiquement sa
rédaction.

Il n'est pas difficile de s'imaginer les
énervements et les découragements que l'on peut
éprouver lorsque la machine dicte ce qui est
licite de faire ou de dire. L'aliénation et une
technolâtrie suréxitée sont ici aux commandes pour
épanouir une société orwellienne prompte à
brimer la liberté d'expression.
On sait qu'une telle entreprise est vouée à l'échec et que
minimiser l'erreur statistique ne suffira pas. Si c'était
le cas nous aurions déjà le traducteur universel.  À la
place des exemples débiles sur la causalité qui nous ont été
resservis maintes fois — Pierre est tombé, Paul l'a
poussé, peut-on déduire que le second est tombé parce que le
premier l'a poussé... (ou bien étaient-ce Socrate et Platon
?) il faut se préparer à des traductions aussi fameuses
que « la vodka était bonne, mais que la viande était
pourrie »[fn::/“the spirit was willing, but the flesh was weak”/].

Le nouveau responsable du projet AREN ira proposer
que les codes sources de la plateforme soient
déposé sous licence CC0, c'est à dire sans aucune
attribution. Il se trouve être lui-même auteur
d'un papier Lafourcade18 très insistant sur
le mot “resource”, où il nous apprend qu'après dix
ans d'existences (douze à présent), son code
source n'est, lui, pas libre de droits et
appartient en totalité à son auteur et que tout
accès, utilisation, détournement, publication ou
divulgation d'informations de tout ou partie de ce
code sans le consentement écrit de l'auteur sera
passible de poursuites. Que peut justifier
qu'après un temps aussi long, un chercheur en
informatique, fonctionnaire dans un laboratoire
public ne rende public le fruit de son travail
mais en conserve jalousement les droits ?  Autant
de gestes symptomatiques d'une manière
particulièrement agressive de conduire un projet
de recherche jusqu'à un aboutissement improbable.
** Controverses dans les savoirs

Le débat inclut la contradiction, qu'elle soit portée par la
colère ou le ressentiment et permet d'exprimer des
oppositions. Peut-il les résoudre ou les dépasser ? Pas
nécessairement. Il est des disputes demeurées ouvertes,
campées sur des positions antagonistes. L'important est
alors que le débat serve à les identifier, les reconnaitre,
les exprimer, les clarifier, surtout si des décisions
doivent advenir en l'absence d'un consensus.
N'est-ce pas l'expérience courante des parlementaires qu'il
s'agit de transmettre ?
Comment procurer un enchâssement des débats et fournir des
capacités de réutilisation des résultats des uns pour les
autres ?

La dispute et son synonyme la disputation, désignaient
au moyen-âge les débats des scholastiques : des échanges
d'arguments contradictoires sur un sujet donné.


Un éclairage historique Waquet14 sur la controverse révèle une masse
de publications, de débats, de recours aux tribunaux, et
d'analyses sur les régimes de savoir en controverses et
polémiques et disputes, et querelles, et diatribes...
Une lexicographie historique montre une fluctuation du
terme.  Au XVII^è, sa spécialité est le débat théologique,
puis devient l'expression discursive du désaccord, du
conflit et de l'antagonisme. L'affrontement de Claude
Saumèze, professeur de philologie, contre Nicolas Heinsius à
Leyde se pousuivra jusqu'à la mort.
Un traitement en privé du désaccord eu — la controverse devenu publique —
fait passer au second plan la question scientifique ou l'éthique.

Jean Leclerc, théologien, historien, critique, journaliste
des XVII^è et XVIII^è siècles dans “Réflexion sur les disputes
des gens de lettres” rassemble les évènements qui ont eu
cours sur le sujet, dictées par l'histoire et l'expérience
et impliqué dans les querelles. Dans toutes les affaires de
la vie civile et entre les hommes, “on ne pouvait dissiper
les ténèbres de l'erreur”. La suppression radicale des
querelles serait l'imposition autoritaire du silence.  On ne
peut donc que tolérer la dispute et son lieu.

Dans une éthique de l'attaque, il s'agira de ne rien mêler
de personnel, de ne pas attribuer à la personne des propos
que n'ont pas été attribué (non-subsidiarité, mais on trouvera
fréquemment l'emploi sans la négation) et de veiller au
respect des règles de logiques. L'étude de la diatribe se
devant de limiter la taille de papier pour attaquer et
défendre et comparer les ouvrages incriminés.

En définitive la querelle est légitime, utile à un monde en
quête de vérité mais doit être réglée, pourvu qu'elle soit
ordonnée. C'est un échange bien pratiqué, plus par souci de
l'échange qu'au nom de la vérité, et pour abréger les
querelles. Mais l'humour n'était pas la qualité majeure de
ce XVII^è...


Un autre cas d'étude sur une période plus récente parue dans
la presse généraliste et spécialisée et qui concerne la
littérature scientifique et ses publications est l'affaire de
la mémoire de l'eau. En 1988, Jacques Benveniste, à l'INSERM,
publie dans Nature : “Dégranulation des basophiles humains
induite par de très hautes dilutions d'un serum”, la
persistence d'une réaction immunologique a un très haut
poison et une recherche homéopathique potentielle.
Droit de réserve de d'éditorialiste : la revue procédereait à une
expertise dans la laboratoire, accompagnée d'un expert et d'un
illusioniste.
Bien que la fraude ne put être révélé, un autre article fut rédigé
en réponse : “High-dilution” experiment : a delusion.
Benvéniste contestera la méthode et l'expertise.
Les conséquences seront en avalanches pour le secteur scientifique et les
laboratoires. L'unité de recherche est supprimée.
En 1991, il lance le domaine de la biologique numérique, ce
qui nourrit encore la polémique. Radicalisé, le débat
scientifique restera limité.
Le Monde avait titré sur
la mémoire de la matière, une découverte française pourrait bouleverser les fondements de la physique,
puis en 1997, une histoire en trois articles de la controverse :
un roman feuilleton chez les scientifiques.
Bénveniste publie un article, conteste l'intervention de la
presse dans des sujets hautement spécialisés et regrette
l'abaissement du débat ; le discrédit est jeté et s'y
mêlent des parascientifiques. Un élément mal étudié dans la
controverse est pointé par Jacques Testard : le poids du silence amusé de nombreux collègues.
Il finira par y avoir un consensus, gagné par l'alignement des non-alignés en attente
du choix de leur posture favorable.

Bénveniste est décédé en 2004. Le domaine de recherche qu'il
avait lancé est aujourd'hui exploré. La controverse se manifeste
sur des temps longs.

L'ingénierie des débats publics... a « tous les ingrédients
de passions » entendit-on à la suite
de cette même conférence.
Y était défendu en premier lieu « l'approche logique du
débat » suivie d'une vision très platoniste :
l'existence d'une « idéosphère » et, « qu'il n'est possible
de désincarner les idées en imaginant qu'elle voyages dans
une empyrée ». Furent prononcés quelques paroles sur des effets de suivisme puis
sur les passions qui entrent dans l'alimentation des
polémiques. Comme exemple, le jury de thèse, qui se produit
entre scientifiques de même discipline, la controverse du
jury puis la thèse débattue.

Pour ce qui est de l'examen et les moyens d'expérimenter les
théories, la controverse (ou la théorie) peut être, en
science dites dures, mise à l'épreuve des faits.

Sur la nature des énoncés :

- le contradictoire n'est pas nécessairement dans
  l'énoncé, qui peut être décidable, selon la forme de la
  preuve.
- La contradiction est non pas présente dans l'énoncé
  mais dans la formulation de la preuve qui vise à
  déterminer s'il est décidable ou non.
- L'objet en lui-même n'est pas contradictoire. C'est la
  propriété dont on l'affuble qui l'est.

Comprendre : est-ce que la preuve qui soutient l'énoncé a un
caractère décidable (vrai ou faux) et dit autrement : est-ce
que l'énnoncé s'accompagne d'un élément probatoire ou
réfutateur ou s'appuie sur des éléments de preuve qu'il
convoque ?
*** Pourquoi fit-on boire la ciguë à Socrate ?
L'histoire
retient qu'il complotait contre Athènes, mais à quoi ?  On
peut supposer que les démagogues et les archontes
ayant eu compris sa pensée réalisèrent
la vision future qu'elle concrétise, celle d'une
société organisée et orchestrée par des spécialistes,
jusqu'au plus haut sommet de l'état, des esclaves,
s'achevant sur une société d'esclaves dirigée par le
philosophe. Le mythe moderne est celui de l'IA qu'une caste
de spécialiste a conçu.
À l'hyper-technicité s'adosse la bureaucratie, le contrôle
de gestion et le contrôle-qualité, conçus comme des
technologies et réalisés pour et par des personnes interchangeables.
*** Forum des débats sur le bien commun

Après quelques mois de développement, Dialoguea se présente
comme une micro-plateforme, un forum, favorisant le
commentaire de textes, le débat public, la méthode
scientifique dans sa partie discursive, une dialectique
propre à la philosophie et un outil herméneutique, sur
lequel le débat peut aller plus loin que sur un tchat ou un
simple forum. C'est du moins ce qu'on espère et que l'on prétend,
car dans les faits, cela ne repose que sur la communauté
qui l'anime.
Pendant quelques temps situés entre les manifestations
 Nuit Debout, l'animation d'Assemblée Virtuelle[fn:: https://www.virtual-assembly.org]
fera souffler un vent d'espoir dans des réunions où on voit
poindre un geste fédérateur.



Qu'apporte le numérique dans ce contexte ?
L'opportunité de débattre à distance de manière asynchrone, en se
fondant sur des principes logiques. Un participant
avait ajouté : et voire uchronique, le débat pouvant se rejouer le temps ;
Mais le débat n'est pas un jeu. Et pouvoir
commenter des sources ne signifie pas nécessairement que l'autre
peut vous entendre. Les conditions qui préexistent
peuvent avoir complètement changées et chacun peut en faire
l'expérience en relisant son propre texte.

Que fait-on après un débat ?
On en fait un autre pourrait-on ironiser !  Du débat on
réalise une restitution, une synthèse, une restitution des
faits, voire même une vue d'artiste. On peut lui donner une
esthétique et tenir un propos pas nécessairement consensuel,
contrairement au vote qui juge sur la quantité.

Préparer des décisions en s'appuyer sur des connaissances scientifiques.
Les recherches sur la décision en
psychologie, en politique et dans les jeux sont intarissables.
Du latin decisio — l'action de trancher une question débattue,
un arrangement, une transaction, la décision apparaît
souvent ainsi au singulier comme le choix
dévolu au dirigeant dit aussi le “décideur”.
Discours
sous-entendant que des moyens d'aide à la décision existent —
l'argent en est un et on peut légitimement s'interroger
sur les rapports de tout temps entretenu avec
la politique —
mais peut-être qu'un ouvrage ou un outil qui entend prêter
assistance revêt un caractère palliatif, ainsi ces
ouvrages traitant de « comment devenir meilleur, gagner à
tout les coups, être un battant, devenir riche, célèbre,
etc. », l'ouvrage de Dominique Noguez, « comment réussir...»
se classant parmi les références incontournables du genre.


Il faut bien garder présent à l'esprit
que le problème est le processus de rationalisation :
le problème est que l'on considère que c'est un processus
(la délibération, le débat, la discussion) donc une machine.
Le problème est que l'on considère que c'est un problème
à résoudre donc.
C'est ainsi que le système en place se corrode,
et lorsque le vrai problème se présente,
l'effritement, déjà bien entamé
entraîne l'effondrement.
On peut croire qu'une alternative “cheap” à facebook
peut faire l'affaire, mais c'est se leurrer :
il faut bien plus que cela et la défense de l'universel masque bien souvent
la défense d'intérêts très particuliers.
**** Une charte du débat éthique

Dans bien des cas, l'enjeu des débats demeure la maîtrise
des beaux parleurs. En politique, il se résume souvent à un
exercice de communication et de séduction : une vielle
histoire qui remonte au temps de Socrate
qui doit se mesurer aux sophistes,
dont Gorgias, Protagoras, Prodicos et Hippias d'Élée.
C'est avec eux que se mesurent Socrate, puis Platon,
antisophistes et à certains égards sophistes eux-mêmes.

Apprentis tyrans, pour certains, qui entendaient séduire les
foules, emporter leurs suffrages par d’habiles
stratégies et construire par une rhétorique le chemin du
pouvoir et de la réussite personnelle...
La sophistique en science et au pouvoir ;

- Le texte de forum des débats[fn::archive.org:forum-debats.fr]
  établit ceci dans
  la charte du débat éthique : « Scientifiques,
  administrateurs et politiciens sont parties prenantes dans
  de grands débats sur des préoccupations collectives pour
  lesquels la nécessité existe de ne décider qu’après des
  débats loyaux et ouverts.

  Aller en direction d’une loyauté et d’une éthique du débat
  est fondé sur quatre critères :

  1. La collégialité : guider les actions d’un groupe de
     personnes (le collège) ayant le même statut et assumant
     les décisions prises par la majorité de ses membres, sans
     en oublier aucun.
  2. La subsidiarité : veiller à ne pas faire à un niveau plus
     élevé ce qui peut l’être avec plus d’efficacité à une
     échelle plus basse, c’est-à-dire la recherche du niveau
     pertinent d’action publique. C’est aussi veiller à ne pas
     se prononcer à la place des autres.
  3. La transparence : par des protocoles clairs et
     intelligibles pour tous.
  4. Le secret : le respect de la vie privé et de la propriété
     intellectuelle. »

#+html: <br/>


Dans un débat il faut être en mesure d'identifier qui parle.
Participer ou dire quelque chose de manière anonyme est parfois
nécessaire, mais ceci ne peut être la norme. Risque sinon
de se déployer une fabrique du discours tenue et mise
en place par quelques-uns qui peuvent attester
à la place des autres ce qui s'est dit séance tenante.


« Le principe de subsidiarité, vaguement
issu d'une tradition d'église où on ne l'a jamais vraiment
utilisé Wolton97,
 était le principe où l'on devait distinguer ce
 qui relevait de la compétence européenne de ce qui relevait
 des États-nations. Selon ce concept miracle, tout ce qui
 pouvait être entrepris à un niveau subalterne ne relevait
 pas de la compétence européenne ; les débats, notamment
 lors de Maastriicht en 91-92 ont été sans fin entre les
 partisans et les adversaires de la subsidiarité, chacun
 s'envoyant à la tête des exemples qui ne convainquaient
 personne, tant les Européens, vieux peuple rompu à la
 politique, savent très bien que la tendance de tout pouvoir
 est d'intervenir jusqu'au niveau les plus bas, sans
 respecter aucune règle. L'abus du mot “subsidiarité” dans
 le débat sur Maastricht l'avait essoré pour un bon moment,
 et les hommes politiques se gardèrent ensuite d'y faire
 trop référence.  Preuve une fois de plus que les liens
 entre tradition et nouveauté ne sont pas facile à tisser.

On ne peut pas se contenter de tout vouloir inventer pour
inventer, et il ne suffit pas non plus de trouver dans la
caisse à outils politique de la tradition politique
occidentale, fût-elle religieuse, un mot ancien pour qu'il
structure l'avenir. Les déboires du mot subsidiarité
devraient faire réfléchir tout ceux qui s'imaginent
pourvoir faire surgir des concepts nouveaux dans le champs
politique européen. »


#+begin_quote
Le grand pari est désormais d'inventer des méthodes de
management qui permettent d'impliquer, de responsabiliser
un maximum de gens. C'est un système qui applique le
principe de « subsidiarité »: tout échelon supérieur
s'interdit de réaliser lui-même ce qu'un échelon inférieur
pourrait faire. Il s'agit d'une délégation à l'envers par
rapport au système antérieur où le président déléguait ses
pouvoirs à la base MondeAffaires89.
#+end_quote
**** La charte du débat éthique de 2015

#+begin_quote
La contribution du public au gouvernement des affaires publiques est
un facteur de robustesse des décisions politiques, avérée de plus en
plus nécessaire face à la complexité d’enjeux drastiques et fortement
techniques. Il s’agit d’aider à une co-évolution des parties prenantes
qui ne peuvent vivre en cohérence et en confiance, sans devenir des
« parties apprenantes et comprenantes ».

Dans ce processus réflexif, les publics autonomes coopèrent à la
construction des modalités de débats favorables à leur montée en
compétence et en influence. Les dispositifs, adaptés à l’émergence de
débats publics argumentés sur des thématiques concernant l’ensemble
des acteurs se la société, vont permettre de concevoir autrement le
dialogue avec les experts et scientifiques. Car la science
d’aujourd’hui se doit de participer à ce défi social : les
scientifiques, comme les citoyens, les administrateurs et les
politiciens, sont parties prenantes dans les grands débats concernant
des défis planétaires, pour lesquels la nécessité existe de ne décider
qu’après des débats loyaux et ouverts.

[ suivent les 4 critères établis précédement ]
#+end_quote
**** Commentaire

#+begin_quote
La contribution du public au gouvernement des affaires
publiques est un facteur de robustesse des décisions
politiques, avérée de plus en plus nécessaire...
#+end_quote
- [2020-05-07 jeu. 19:20]  Robustesse avérée si je suis bien.

  Mais la jonction directe de la proposition suivante
  donne une sensation bizarre,
  peut-être
  avérée et de plus en plus nécessaire ?
  Si elle est avérée, où, et quand,
  sur quelle base ?
  Pourquoi, si on l'a eue entre les mains,
  est-elle diluée, disparue,
  pourquoi aurait-on cessé de solliciter,
  ou de mobiliser, de mettre en mouvement
  la contribution publique ?
  C'est visiblement un élément de contexte majeur
  qui positionne ce texte,
  et le cerner, le nommer, en donner une évocation
  serait très favorable.

#+begin_quote
...face à la complexité d'enjeux drastiques et fortement techniques.
#+end_quote


- [2020-05-07 jeu. 19:23]  Je ne vois pas de façon évidente
  de quels enjeux on parle,
  de ceux qui se trament dans la société,
  en général ?

  Il serait bon d'en donner au moins l'equisse,
  de les évoquer, sans trop s'y enfoncer
  et en évitant les tartes à la crème.

  Il n'y a pas que l'aspect technique
  qui puisse contribuer à la complexité
  —ce que laisse bien entendre la tournure—,
  il n'y a pas non plus que la technique
  qui engendre de la complexité ;
  Même si toujours, la complexité
  caractérise essentiellement
  les représentations que se font les hommes,
  qui peuvent les mener parfois,
  lorsqu'une situation déborde leurs concepts,
  à se sentir saturés d'un autre phénomène passible
  d'une appellation de complexité,
  mais cette fois, ressentie comme du monde.

- [2020-05-07 jeu. 19:28]  Il se trouve,
  que le public n'est pas directement en mesure
  d'avoir une voix sur des sujets techniques.

  C'est ce qui avait présidé semble-t-il à ce que les Grecs
  fassent une partition stricte
  entre les registres techniques
  et le débat de valeurs,
  la présence dans l'un excluant l'autre.

  L'expérience montre que quand on soumet
  à des personnes «raisonnables»
  un sujet, qui peut mobiliser une technique difficile,
  comme dans les jurys d'assises,
  ou encore,
  dans les commissions locales (dont le nom exact m'échappe),
  sur les installations classées (usines, etc.),
  les personnes s'impliquent pour se donner une maîtrise du sujet,
  d'une façon qui laisse entendre
  que si le public n'apporte pas de contribution
  aux décisions publiques,
  c'est qu'il y a un canal d'expression qui ne se forme pas.

#+begin_quote
Il s'agit d'aider à une coévolution des parties prenantes
qui ne peuvent vivre en cohérence et en confiance,
sans devenir des « parties apprenantes et comprenantes ».
#+end_quote

- [2020-05-07 jeu. 19:36]  Ici on est entré directement dans l'arène d'un débat,
  les parties prenantes adéquates
  sont déjà là, sans lacune,
  il y a un amphithéâtre de fait, établi.

  Ça arrive un peu à la catapulte,
  et justement, il me semble percevoir
  que c'est cette partie-là qui est défaillante.

  Peut-être est-ce qu'on pense qu'en réussissant une scène de débat,
  même partielle dans le public qu'elle aura agrégé,
  on fait monter la sauce (l'assos. ?),
  et la réussite convie de fait un public élargi.

  C'est tout à fait défendable,
  mais il faudrait l'amener dans le propos.

- [2020-05-07 jeu. 19:40]  Ce qui se tient,
  ce sont des échanges de langage.

  J'ai trouvé chez George Steiner exactement ce que je pensais,
  à savoir que chaque locuteur invente, à la marge,
  mais de façon essentielle, sa propre version de la langue
  dont il partage un flot commun avec son milieu culturel ;
  autrement dit, parler, c'est traduire,
  et en effet, c'est une façon de reconnaître l'étrangeté a priori
  de n'importe quel congénère,
  et pour traduire,
  il faudra de surcroît admettre pleinement
  que son point de vue, son référentiel individuel
  est tout aussi légitime que le nôtre,
  du moment qu'on peut toujours tendre la main
  pour le ramener à la table de la discussion,
  que les échanges ne divergent pas en attaques personnelles
  ou dans le registre d'autres violences,
  d'autres irrespects d'autrui.

  Je crois qu'il faut énoncer quelque chose dans ce goût,
  qui donne sa place aux termes de confiance,
  de volonté de cohérence
  (mais pas de vue unitaire !),
  cohérence qui est avant tout, et presqu'uniquement
  la volonté de poursuivre les échanges,
  de réitérer le jeu infini de la vie,
  et non de régler un problème,
  bien calibré avec l'agorithme idoine fourgué dans une machine de Turing universelle,
  qui termine, et promptement, encore,
  on n'a pas que ça à faire.

  Les termes apprenantes et comprenantes,
  sont alors solidaires de cet énoncé de Babel.
  Un mythe qui est sous-considéré, littéralement occulté,
  alors qu'il est d'une importance majeure.
  Parce qu'il l'est.

  La revendication d'universalité de l'Occident
  (et pas que pour la déclaration des droits de l'homme),
  n'est qu'une amplification d'une perte de contact avec le sol,
  avec les autres, véritablement autres,
  qui avait déjà frappé les Grecs.

- [2020-05-07 jeu. 20:18]  Sinon apprenantes et comprenantes,
  c'est un peu jargon,
  je préférerais écrire, décrire qu'on apprend, etc.

#+begin_quote
Dans ce processus réflexif,
les publics autonomes
coopèrent à la construction des modalités de débats
favorables à leur montée en compétence et en influence.
#+end_quote

- [2020-05-07 jeu. 19:49]  Bon, mais comment s'amorce cette arène ?

  Et puis, comme point d'embrayage,
  il faut des conditions minimales de respect,
  d'un genre que j'ai essayé d'évoquer,
  sinon on a des possibilités de divergence,
  ou de sécession dont on a pléthore d'exemples.

  On est bien une société qui fabrique
  la radicalisation,
  et plus largement l'exacerbation de toutes sortes de particularismes.

#+begin_quote
Les dispositifs,...
#+end_quote

- [2020-05-07 jeu. 19:53]  Quels dispositifs ?

  Le terme «dispositif»
  est issu du vocabulaire militaire dujarier2017management,
  apparu à la fin du XVIII^e siècle.
  Il désigne précisément
  un « ensemble des moyens disposés conformément à un plan ».
  Il est abstrait
  et permet de préparer les batailles.
  Importé dans les entreprises,
  le mot s'apparente au planning,
  à l'organisation détaillée de l'action
  avant qu'elle ait lieu
  et déterminée loin d'elle.
  C'est cette caractéristique sociologique centrale
  qui nous amène à regrouper sous le même terme
  des pratiques managériales pourtant en apparence diverses,
  changeantes et aux noms abscons.
  Leur diversité formelle
  — Ici il lui manque la notion de ce qu'est formel,
        toutes ces pratiques reviennent formellement,
        au sens mathématique, au même,
        abstraitement au même —
  pourrait laisser penser
  qu'il n'est possible de les analyser qu'une à une,
  comme cela se fait généralement
  tant dans les pratiques managériales
  que dans la recherche.
  Ce livre montre
  qu'elle cache en fait une régularité sociologique,
  du point de vue de l'encadrement du travail.
  La conception en « plan »
  de l'activité productive
  est une constante
  derrière le foisonnement et l'agitation des
  « outils », « techniques » et autres « démarches » managériales.
  En définition de chaque tâche, comme une machine.

  Foucault (2001) définit le dispositif comme
  « un ensemble relativement hétérogène,
  comportant des discours,
  des institutions,
  des aménagements architecturaux,
  des décisions réglementaires,
  des lois,
  des mesures administratives,
  des énoncés scientifiques,
  des propositions philosophiques, morales, philanthropiques :
  bref, du dit aussi bien que du non-dit ».
  Agamben (2007) précise cette définition
  en spécifiant ce que fait faire le dispositif :
  « J'appelle dispositif tout ce qui a,
  d'une manière ou d'une autre,
  la capacité de capturer, d'orienter, de déterminer,
  d'intercepter, de modeler, de contrôler et d'assurer
  les gestes, les conduites, les opinions et les discours
  des êtres vivants. »

#+begin_quote
adaptés à l'émergence de débats publics argumentés
sur des thématiques concernant l'ensemble des acteurs de la société,...
#+end_quote

- [2020-05-07 jeu. 19:52]  Je n'aime pas ce terme acteurs,
  qu'est-ce qu'il y a d'autre que des acteurs,
  et de qui parle-t-on,
  de personnes,
  de groupes d'influence... ?

#+begin_quote
... vont permettre de concevoir autrement
le dialogue avec les experts et scientifiques.
#+end_quote

- [2020-05-07 jeu. 20:03]  Mais pourquoi ces deux lascars-là \\
  déboulent-ils sur la scène ?  Qui les a invités ?
  Pourquoi ?
  S'ils doivent y occuper une place,
  il faut la décrire.

#+begin_quote
Car la science d'aujourd'hui
se doit de participer à ce défi social :
les scientifiques,
comme les citoyens,
les administrateurs et les politiciens,
sont parties prenantes dans les grands débats
#+end_quote

- [2020-05-07 jeu. 20:19]  Il faut dire, il faut avoir dit
  ce qu'est ce défi social ;
  réussir à concevoir notre monde,
  l'état de crise qui le traverse,
  se décider à reconnaître qu'on est emportés par le flot,
  et qu'on n'y comprend rien,
  qu'on n'a plus de catégories nous permettant d'appréhender le réel
  —c'est ça, une crise, une vraie—,
  ou est-ce que je me trompe ?

  Ou le défi est-il de retrouver la faculté à débattre ?

- [2020-05-07 jeu. 20:05]  S'ils sont parties prenantes,
  établies, \\
  alors tout va bien : le débat a lieu.

  Qu'est-ce qui ne va pas ?

- [2020-05-07 jeu. 20:06]  Ces catégories me dérangent,
  toutes ces personnes sont «des citoyens», également,
  et on distribue des rôles qui ont l'air manifestes,
  mais n'y a-t-il que ceux-là,
  est-ce qu'on a décrit toute la plage,
  pourquoi ceux-là en particulier ?

  Il me semble qu'il y a force organisations qui se vouent à faire pression
  sur les organes politiques, législatifs, etc.,
  notamment.
  Et qui ne pèsent pas pour peu dans les actes collectifs.

#+begin_quote
concernant des défis planétaires,
pour lesquels la nécessité existe...
#+end_quote

- [2020-05-07 jeu. 20:08]  Pourquoi tout d'un coup les défis planétaires,
  et pourquoi sont-ils planétaires,
  et ces défis planétaires, lesquels sont-ils ?
  On les a éludés au début de la charte,
  voilà qu'on les fait débarquer ;
  En prime,
  il semble que ce ne soit que pour ceux-là
  qu'il y ait nécessité,
  d'un débat je suppose...

#+begin_quote
... de ne décider qu'après...
#+end_quote

- [2020-05-07 jeu. 20:10]  La tournure, « nécessité existe
  est gau\-che.
  Elle est particulièrement cruciale, peut-être.
  Ou peut-être est-ce pour ces questions,
  spécialement, que le débat est défaillant.

  Mais alors, il importe d'avoir dit de quoi on parle.

  Parce que si ça se trouve,
  autrui a une perception bien différente des choses.
  (Sincèrement, j'entends.)
  Ou autrui aura motivation à faire entendre un point de vue
  diamétralement différent.

  Dans tous les cas,
  on ne peut pas effacer ces divergences,
  et donc,
  il me semble,
  le rédacteur de la charte
  doit déclarer sincèrement son point de vue.

  Et pas le point de vue de nulle part de la science,
  la connaissance sans sujet connaissant,
  pareillement revendiquée.

#+begin_quote
...des débats loyaux et ouverts.
#+end_quote

- [2020-05-07 jeu. 20:04]  Loyaux et ouverts,
  c'est ce qui doit avoir été dit un peu plus haut.

  On a vu que ça se ramène à des modalités de respect mutuel,
  ou quelque chose comme ça.

- [2020-05-07 jeu. 20:22]  À part ça, la tournure laisse entendre
  que pour tout le reste,
  on peut jouer de traîtrise et d'opacité.

  Quant à cette question de l'ouverture et de l'opacité,
  de la fermeture,
  elle n'est pas triviale
  (voir Kursh.1971).
  Justement, trouver à en dire quelque chose,
  ce serait fantastique.

- [2020-05-07 jeu. 20:23]  Mes idées, c'est que ce qui faisait entité,
  et qui s'est sédimenté dans les structures de notre société,
  et à quoi nous sommes accoutumés,
  est radicalement remis en cause
  notamment par l'avènement des réseaux numérique,
  par des modalités nouvelles et déployées
  dont se connectent les choses de notre monde.

  C'est en bonne partie la raison pour laquelle
  nous avons des catégories périmées,
  souvent inopérantes,
  pour penser notre temps.

#+begin_quote
Aller en direction d'une loyauté
et d'une éthique du débat
est fondé sur quatre critères :

1. Collégialité :
        guider les actions d'un groupe de personnes
        (le collège)
        ayant le même statut
        et assumant les décisions prises
        par la majorité de ses membres,
        sans en oublier aucun.
#+end_quote

- [2020-05-07 jeu. 20:26]  Tiens, tu as déjà statué sur le type de vote,
  alors que tu avais plein de réflexions là-dessus,
  et que justement, peut-être,
  le problème de notre temps est, notamment
  cette composante de la prise de décision ?

#+begin_quote
2. Subsidiarité :
        veiller à ne pas faire à un niveau plus élevé
        ce qui peut l'être avec plus d'efficacité à une échelle plus basse,
        c'est-à-dire la recherche du niveau pertinent d'action publique.
#+end_quote

- [2020-05-07 jeu. 20:29]  Là, avec «élevé»
  tu te réfères implicitement à une hiérarchie
  (du moins c'est une façon probable de l'interpréter)
  qui peut être supposée
  d'entités spatiales
  (des parties d'ensembles successivement emboîtés,
  comme on le fait administrativement
  — mais il n'y a pas qu'une hiérarchie,
  il y a un entrelacs invraisemblable,
  avec une multiplication des entités comme de petits pains,
  pour toutes les sortes de choses qu'on trouve bon de devoir administrer,
  du genre,
  un bassin versant, une rivière, une profession...).

  Ensuite tu dis «échelle»,
  ce qui semble confirmer l'interprétation ;

  Mêmes remarques.

  Bien sûr qu'il y a des effets de ce genre,
  mais par exemple, si on prend la succession région, nation, union de nations, «internation»,
  et qu'on considère le droit,
  on se rend compte qu'il se passe un fouillis innommable,
  avec les traités internationaux qui viennent recouper le droit national,
  de façon très hétéroclite.

  Bref, les rôles sont mal distibués.

- [2020-05-07 jeu. 20:34]  J'aurais tendance à suivre mes propres idées,
  et je ne suis pas le seul à clamer cette évidence :

  il me semble que la reprise en main de la conduite de nos affaires
  (en toute généralité),
  avoir la sensation d'avoir barre sur ce qui nous arrive,
  passe par une relocalisation des échanges,
  se retisser dans un mode de vie étroitement coordonné à nos milieux,
  notamment pratiquer une agriculture idoine de ce point de vue,
  avoir une véritable localité,
  c'est-à-dire («entitation»),
  plus de liens locaux que de liens distants,
  (short-range activation and long-range inhibition,
  ces équilibres duaux sont absolument partout
  dans tous les phénomènes qu'on peut considérer autour de nous,
  si on veut bien avoir ce regard ;
  En écoutant La Méthode scientifique d'Hélène Courtois
  tu peux déceler que les structures de très grande envergure
  qu'elle a contribué à observer dans l'univers,
  résultent de la prééminence de la gravitation à relativement courte distance
  par rapport à l'expansion de l'espace, qui domine à plus grande distance,
  ce qui donne des filaments de galaxies en quelque sorte,
  un peu comme des fascias dans l'organisme),
  et cela suppose de juguler les transports,
  de cesser de trimbaler maladivement des espèces,
  que ce soit de celles qui vont nous apporter des invasions de plantes, d'animaux,
  ou de microbes,
  cesser de mettre en court-circuit des compartiments vivants,
  qui se résolvent alors en soupe indifférenciée,
  c'est-à-dire, cesser de massacrer les milieux vivants,
  la «biodiversité», comme le veut ce terme qui est devenu la méga-tarte à la crème.

  Les monnaies locales,
  par exemples, sont une reprise en mains
  de ce qui nous arrive,
  ici,
  et maintenant,
  d'une manière et à une portée qui nous est accessible.

  Plutôt que de déblatérer sur des engagements pour 2380
  (ou peut-être, 2030, 2050),
  et, tu auras noté,
  des engagements sur des phénomènes dont on n'a pas la conduite,
  comme le réchauffement climatique
  — qui a le thermostat ? Personne —,
  et donc, par-dessus le marché
  (bien sûr, tout problème se résout par un marché,
  concurrentiel,
  le dispositif général à optimiser l'univers),
  comme on le disait,
  à des échéances où rien n'indique
  qu'on pourra venir nous en demander des comptes.

#+begin_quote
C'est aussi veiller
à ne pas se prononcer à la place des autres.
#+end_quote

- [2020-05-07 jeu. 20:53]  Généralisation intéressante,
  et en même temps,
  comme dans presque tout ce que l'on dit,
  on table sur des choses qu'on nous a dites,
  et qu'on n'aura eu que très partiellement loisir
  de vérifier soigneusement,
  il importe de façon majeure de
  se tisser en réseau,
  c'est-à-dire de dire de qui on tient ce qu'on avance,
  de citer,
  de se localiser, s'indidualiser,
  s'autonomiser,
  c'est-à-dire, ne pas compter que tous pourront aller suivre
  tous renvois que je fais,
  et donc,
  tout en donnant la référence,
  je dois prendre la peine extrême
  de lui adjoindre une image que je juge expressive, fidèle,
  de ce qu'il y a au bout de la référence,
  et qui permet de clore ce que j'ai dit
  aux limites de ce que j'ai dit,
  de se couper du réseau,
  de former une archive autoporteuse.
  De faire archives.
  (Archives, strictement, est un nom féminin pluriel.)

#+begin_quote
3. Transparence :
   par des protocoles clairs et intelligible pour tous.

4. Secret :
   le respect de la vie privée
   et de la propriété intellectuelle.
#+end_quote

- [2020-05-07 jeu. 20:58]  Celle-ci, fondamentalement,
  dans son essence, se rattache tout d'abord
  à ce que je disais à l'instant,
  omer davar beshem omro
  (Pirkei avot),
  dire quelque chose au nom de celui qui l'a dit,
  quiconque dit quelque chose au nom de celui qui l'a dit,
  apporte de la rédemption au monde.
**** Comment restituer de long débats ?

La restitution est un ouvrage subjectif.
Pour qu'elle puisse être acceptée par un collectif,
il faut : soit un comité éditorial fermé, avec ces règles propres,
ou bien un comité ouvert (de type open science),
avec des règles de modération transparentes,
capable de procéder à une édition collective.
** Démocratie, numérique et fonction publique

On ne peut pas dire que ces dernières années la tendance a
été à l'encouragement de la fonction publique. Dans quels
contextes ont été pensées les sciences de l'argumentation et
du numérique ? Faire fonctionner des équipes soudées à
l'intérieur de laboratoires pour pouvoir assister les
politiques publiques par la mise en réseau sur des canaux
communs et partagés — pour l'éducation, les territoires,
l'animation et la vulgarisation scientifique — tout ceci
pour favoriser des débats civilisés et orchestrés par un
noyau d'intellectuels apparaît comme un horizon plus
raisonnanble que l'objectif entreprenarial soutenu par la
théorie du capital humain des économistes.
« Ce nouveau type d'humain promu par le néo-libéralisme : un
porteur de capital fait d'un certain nombre d'aptitudes
destiné à être contracté, enrichi,
développé. L'entreprenariat général de soit » dixit Frédéric
Lordon travail-salaire-profit-2019.

L'existence d'un marché de la démocratie participative Nonjon_Mazeaud_18,GA18,
symptomatique de l'existence de cet autre marché global qui entend
résoudre tous les problème d'une startup nation, offre
l'opportunité de financer, avec des fonds publics, un même
projet trois fois : présenté sous des angles différents, le
« financement sur projet » qui permet de capter trois
sources de fonds n'est pas tant un problème en tant que
tel. Ce qui est discutable, c'est l'administration,
l'inter-médiation, la bureaucratie et la quantité anormale
de procédures et de formulaires et d'intendances que cela
encourt, qu'il faut nourrir et que les intermédiaires ont intérêts
à entretenir. Là où une mission publique bien informée serait
nécessaire, se cultivent des aréopages de partenariats et de
sous-traitances et une manière d'échapper aux marchés publics.
Ce qui démontre combien ont été désolidarisées les activités
académiques. Dès lors, les travaux de programmations et d'administrations
des plateformes seront considérée comme des tâches subalternes,
résultantes de fabrications qui doivent être sous-traitées et
non d'un travail intellectuel bloch2005systemes.
L'exercice du partage des connaissance, triées à l'avance,
exigeant des accréditations particulières pour pouvoir
y assister, sont des appels à grands cris à
“l'interdisciplinarité” mais qui se heurtent à la simple
difficulté de franchir leur propres murs, mais qu'importe
désormais, puisque les vidéos sont consultables sur le web !  Et
enfin le point de vue des spécialistes sur la réglementation
qu'ils réservent au conseils des politiques et aux autres
spécialistes de leurs domaines se résument en grande partie à
un bref exercice de communication publique et au papier
trimestriel qui reprend à peu de frais la rédaction
précédente.  Ces trois facteurs contribuent à l'édification
régulières d'impostures qui produisent les apparences d'une
recherche en bonne santé mais sans en avoir la teneur.

Le débat scientifique sur le débat numérique n'est pas allé
plus loin qu'un feu nourri dans le forum
ni au-delà du constat béat de l'influence exercée
par Cambridge Analytics.


La plateforme de débat numérique qui sera utilisée par
l'université dans le projet AREN sera une copie de
celle réalisé par la spinoff Cartodébat et la troisième
tentative d'en faire une ;
Ce n'est plus du plagiat, mais de la copie
conforme et la démonstration de l'incapacité
de faire surgir un programme éducatif libre.

Opportunisme politique et commercial,
communication et marketing ont trouvé là un terrain
d'entente et en sus avec la bénédiction du CNRS.  Sous
quelles conditions ? Aucune. si ce n'est l'estime qu'il
est possible d'en retirer, la part attribuée aux recherches
n'a d'autres retombées que les nouvelles connaissances
qu'elles auront produites et l'objet : une “innovation”, une
plateforme, suivant son propre et lent parcours pour répondre à la
demande et aux perspectives futures des technologies de
l'information et de la communication, très
largement émancipée des recherches qui l'ont produites. Une
palette de noms viendront tout de même s'épingler
au projet AREN inachevé. Des invités privés auront même le
privilège de capter des parts substantielles de
financements, s'attribuant des travaux dans le rôle de la
« visualisation », cependant que — nouveau traitement de faveur —
chacun peut témoigner qu'ils ont à peine fait acte de présence.

À ce stade, ce qui nous frappe,
c'est l'impuissance et l'incurie des pouvoirs publics
et des responsables politiques. Tout ce monde
adossé de sociologues et de juristes et d'universitaires
encourage le bourgeonnement de nouvelles structures
sociales et technologiques dont ils ne pourront se départir
par la suite, pendant que de vrais projets de recherche
audacieux et ambitieux sont privés de moyens.
Comment un mode d'organisation aussi anti-démocratique
pourrait-il bien prétendre amener à plus de démocratie ?
Car ce n'est plus l'exercice du débat qui est proposé — celui-ci
ne peut se tenir que dans les lieux où il avait cours — mais
bien une société du lobyyisme en puissance, privilégiant les
rapports de pouvoirs et d'influences.
Sans vraiment s'en rendre compte, la classe sociale censée
penser et imaginer le futur se constitue en une société du
narcissisme.

#+begin_quote
Dans les sociétés du narcissisme, les électeurs comme leur élus sont
centrés sur la réalisation persistante d'eux-mêmes au détriment de la
relation aux autres, figés sur le présent et incapables de différer
leur satisfaction.  Peut-être que les français n'ont-ils que la classe
politique qu'ils méritent.  Le « moi-isme » règne sur les écrans
post-modernes [...]  tout le monde parle et personne ne dit rien [...]
il y a la même différence entre la démocratie représentative et la
démocratie directe qu'entre un portrait et un instantané rectifié par
photoshop [...]  L'ère des médias désigne justement un état de fait où
les medias ne médiatisent plus rien, mais transmettent vers le haut
les résultats des sondages et vers le bas les « éléments de langage »
SCHNEIDER13.
#+end_quote


Elle-même sociale et scientifique, une question que l'étude
de Pallarès Pallarès19 laisse de côté est pourquoi il est important que
la pédagogie assiste les capacités de développement d'une
argumentation ?

La science enquête sur tout et la science se pratique par
des citoyens.  Se posent des tas de questions sociales et
scientifiques, telles que l'avenir des sociétés et quels
progrès scientifiques, tout particulièrement ceux qui
affleurent dans des domaines que peuvent mobiliser les
élèves : les techniques, les relations sociales, l'économie,
la politique, l'axiologie, la santé, l'environnement et les
savoirs scientifiques eux-mêmes.  C'est au regard des
connaissances et des domaines qu'ils sollicitent que la
« qualité de l'argumentation »,
est « évaluée ».  Mais enfin le pré-requis reste tout de
même que les connaissances appelées en renfort aient des
raisons d'être exhibées, qu'elles soient à propos, et en lien
directement ou indirectement avec un cours et un discours
cohérent.

Les tentatives de
classification des compétences argumentatives,
en ensembles tels que rhétorique,
dialectique, épistémique et critique,
sonnent comme
des exemples de séparation
de la pensée, en quête de ses propres fragments.
Certainement il eut été adéquat d'avoir des exemples de discours
d'élèves.

Rechercher des structures régulières où l'expression
scientifique la plus rigoureuse
est mathématique et ne comporte pas de sujet a pour conséquence
que les sujets et
les observateurs s'effacent systématiquement pour laisser la
place à des phénomènes qui se transportent
et se justifient d'eux-mêmes.
Or la phénoménologie même va, court, est tendue en direction
du sujet humain, de son esprit et de sa perception.
Cela se produit par un phénomène mimétique d'une part,
et de l'autre, car nous sommes fortement encouragés
dès nos plus jeunes âges, à raisonner ainsi
avec des problèmes à sens unique.

Dans la splendeur de la cité grecque antique,
quel est l'instrument par excellence de l'influence,
Quelle est la clé qui ouvre la porte des honneurs ?
La route qui mène la porte aux postes de commandements ?
C'est essentiellement la parole. La langage même l'identifie
avec la raison, car c'est le même mot : λόγος.

Pris dans le labyrinthe des constructions formelles,
nous ne saurions que faire de cires et de plumes,
lors que nous n'avons d'autre espérance que
de s'élever, et, avec une prise de recul suffisante,
former une image d'ensemble.
** Pourquoi écrire

Un bon point de départ pour une recherche est une revue de
la littérature existante, l'objet étant moins de faire
avancer collectivement La Recherche, que d'évaluer l'état de
nos propres connaissances et de s'assurer que nous savons ce
que nous sommes en train de faire pour deviner les effets et
les répercussions qu'elles peuvent avoir.

Lorsque j'annonçais à une collègue impliquée qu'écrire au
sujet de l'activité que nous menions devenait urgent pour
parvenir à comprendre ce que nous vivions,
elle me répondit : « Écrire ? Mais que veux-tu écrire ? »

La question se pose en effet
et ce qu'il y a de si particulier dans le contexte politique
instable que nous traversons et qui nous
emmène dangereusement dans une ère post-démocratique —
c'est qu'il y a des personnes qui questionnent
la légitimité d'une émancipation,
des recherches et d'une éthique.
La seule attitude qui vaille pour quiconque en a les moyens
et entend ou prétend rédiger
une charte du débat numérique
serait de les encourager.

Tout ceci indique assez nettement
les lieux de délabrements de la pensée critique occidentale.
Le visage de la post-démocratie s'incarne sous les traits de politiciens,
de bureaucrates, de managers des ressources humaines et de
designers en tout genres,  promoteurs « d'ingénieries du
sensible » ou de design de politiques publiques, tous prompts
à exhiber des paires de mots
associés-collés, que l'on touve plus volontairement
dans le marketing, pour tenter de se situer
dans des registres croient-ils conceptuels ou méthodologiques,
mais en définitive
ne parvenant qu'à agiter le spectacle de la pseudo-intellection.
« Un peu de novlangue ne fait pas de mal » ? Si. Et même beaucoup.

Mais chacun reste libre de se prononcer et de donner son avis sur ce que
l'organisation collective doit ou devrait être.
Une fois institutionnalisées, des communications s'articulant
majoritairement autour des mots-clés et de calendriers de
réunions qui définissent quand se tiendront les prochaines
réunions peuvent dès lors se tenir régulièrement. Un peu de temps
sera souvent perdu pour parvenir à coordonner correctement
ces groupes en visio-conférence ou
trouver les câbles des projecteurs : la
pseudo-communi\-cation — bien que nécessaire pour le
déroulement des démocraties — devient disproportionnée.

Et une fois saisie la précession de la forme sur le fond,
embellie pour palier au vide, ne nous reste plus qu'à crever
la baudruche.

Malgré l'intrication académique, l'omniprésence des unités
de recherches, les relations continues avec les
établissements publics et ses quelques chercheurs qui tolèrent
les parias de mon genre, les articles qui se suivent — et qui
égrainent des noms d'auteurs qui n'auront même pas
l'occasion de prendre connaissances des papiers en
questions, qu'importe pourvu qu'il y ait des noms ! — rien
n'y fait : nulle réflexion de fond, aucune recherche, aucun
débat ; tout semble cousu de fil blanc pour que la politique
serve un seul objectif : capter des financements et se faire
voir.

Pour ceux qui feignent de ne pas comprendre, il n'est donc
pas concevable que je puisse réaliser autre chose
que les basses œuvres de l'Université, et
leur assitance technique et, n'étant
nullement incité à la rédaction, celle-ci s'avèrera harassante et
laborieuse. Si je parle encore de démocratie, c'est ici dans sa
version escamotée
en somme,
par de la “communicatique”
et,
dans sa forme spécialisée mais dépouillée de réflexion de
fond, de “débatique” et qui plus est en phase de satiation
sémantique, tant le mot débat aura été répété et essoré, qu'à
la fin il peut se vider de son sens.


N'étant pas capable de saisir ce qu'est l'informatique, ce
mot banni, une designer disait : « je ne vais pas faire du
numérique toute ma vie ». Ne sachant vraiment de quoi elle
parlait, car que peut bien vouloir dire : « faire du
numérique » ? Une certaine somme de
connaissance est nécessaire pour parvenir à concevoir et préserver un
réseau de communication, un lieu de discussion organisé,
constamment disponible pour le plus grand nombre et agréablement
illustré.  Il semble raisonnable de vouloir garder visible le lieu
de la discussion, au-delà de sa propre capacité à le faire exister.
Se prépare-t-on encore à faire du jetable, à effacer des
informations ? À tourner des pages blanches là où
s'étaient organisés des dialogues mûris ?
Il faudra encore davantage de connaissances et
de patience pour aboutir à une
critique constructive et inventer une alternative durable,
d'un medium qui, comme chaque medium, conditionne les
relations de pouvoirs soules2007-Innis.

#+latex: \begin{quoting}
« Un long processus a vu le cheval de Troie de la
communication pénétrer l'univers clos du politique,
s'inviter dans la conquête et l'exercice du pouvoir, y
jouant un rôle de plus en plus important imposant sa
rationalité à la raison d'État, la surdéterminant, la
corrodant jusqu'à se substituer à elle : la communication
est devenue la raison d'être de la politique et les spin
doctors (les conseillers en communications) en ont pris le
contrôle [...]
Le travail des spin doctors
se prolonge ensuite vers celui des story spinners
qui ont désormais pour tâche de synchroniser
la mise en mouvement de l'opinion
et la mise en récit des évènements [...]
La recherche du buzz et du clic permanent
n'est pas qu'intempérance :
une stratégie politique ou plutôt anti-politique
est à l'œuvre [...] Une passion pour la déréglementation
[...] Il ne s'agit pas simplement d'un dérèglement de
l'information, mais de la désintégration de tout
l'espace de délibération qui est inhérent à toute
démocratie [...] Les fausses nouvelles, les factoïdes de Reagan, ont toujours
existé bien avant l'arrivée des fake news. » Salmon19
#+latex: \end{quoting}



En 2008 ouvre le Media Lab, un laboratoire du MIT consacré à
la narration du futur (Center for Future Storytelling).
Leur recherche portent sur les moyens
de capturer et de partager nos informations visuelles.
Comment créer des connections entre notre environnement
physiques et nos sources d'informations, de manière
influentes.
 Comment créer des systèmes de communications
 qui comprennent mieux le flux qu'ils transportent
 et l'utilisent pour créer des connections
 plus riches parmi les utilisateurs.
 Comment créer des réseaux sociaux,
 qui interagissent, collaborent
 et apprennent avec les gens en tant
 que partenaires.
 Comment les réseaux de senseurs augmentent
 et médiatisent l'expérience humaine, l'interaction
 et la perception.
 Comment créer des bâtiments et des villes
 qui "répondent” plus intelligemment aux besoins
 et aux désirs de leurs habitants.

Ce laboratoire ouvrit peu de temps
après la grève des scénaristes américains
(Writers Guild of America).
A cheval sur l'année précédente, la grève avait
réuni 12000 scénaristes et avait eu pour
conséquence d'interrompre les tournages d'une
quinzaine de séries, certaines allant jusqu'à
reprendre ce thème à l'intérieur même de leur
récit.


[2020-12-09 mer. 07:46]  La banalité et la non-décision
sont au centre de la situation : l'individu préoccupé
par le gain et la vente, par le spectacle et l'imposture,
somme son entourage de ne pas penser et de le conformer
à une configuration, de le modeler à une situation dont
il espère tirer un profit. Lui-même personnage conforme
et influencé, disposé à abstraire le fond pour ne discuter
que des apparences, spectateur d'une fiction hypnotique
au quotidien.
** Matrice médiatrice
Comme le rappelle Žižek Zizek99, il est bien connu que
dans la plupart des ascenseurs
le bouton “fermer les portes”
est un placebo totalement dysfonctionnel,
placé là seulement pour donner aux individus l'impression
que d'une certain façon ils participent,
contribuant à la vitesse du voyage de l'ascenseur.
Quand on presse le bouton, les portes
se ferment exactement au même moment que si on avait pressé
le bouton de l'étage sans “accélérer” le processus en
appuyant aussi sur le bouton “fermer les portes”.  Ce cas
extrême et limpide de fausse participation est une métaphore
appropriée pour la participation des individus
à notre processus politique postmoderne. Ceci est de
l'occasionalisme le plus pur. Selon Malebranche
Malebranche1712, nous sommes tout le temps en train de
presser de tels boutons, et c'est l'activité incessante
de Dieu qui les coordonne entre elles avec les évènements
qui en découlent (les portes de referment), tandis que nous
croyons que c'est le résultat de notre pression.

Pour cette raison, il est crucial de maintenir ouverte cette ambiguïté
radicale sur comment et de quelle manière le cyberespace affecte nos vies.
Cela ne dépend pas de la technologie en temps que telle, mais de son
mode d'incrustation sociale.  La possibilité est offerte pour celui qui
manipule la machinerie, qui fait fonctionner le cyberespace, de
littéralement voler notre corps virtuel, nous privant de son contrôle,
de telle sorte qu'on ne peut plus désigner ce corps comme “le sien”.

Ce que l'on rencontre ici est l'ambiguïté constitutive de la notion de
médiatisation : originellement la notion désigne le geste par lequel
un sujet est dépossédé de son droit direct et immédiat de prendre des
décisions.  Le grand maître en médiatisation politique était Napoléon
qui laissa aux monarques conquis l'apparence du pouvoir tandis qu'ils
n'étaient plus en positions de l'exercer.  A un niveau plus général, on
peut dire qu'une telle “médiatisation” d'un monarque défini la
monarchie constitutionnelle : ici, le monarque est réduit au simple
geste symbolique et formel de mettre les points sur les « i », de signer
et donc de conférer la force performative aux décrets dont le contenu
est déterminé par le gouvernement élu.

Et est-ce que, Mutatis mutandis, il n'en irait pas de même pour la
numérisation progressive de nos vies quotidiennes, au cours de laquelle
le sujet est aussi de plus en plus “médiatisé”, imperceptiblement
dépouillé de son pouvoir, sous le faux déguisement de son
augmentation ?

Quand notre corps est médiatisé (saisi dans le réseau de média
électronique), il est simultanément exposé aux menaces d'une
“prolétarisation” radicale: le sujet est potentiellement réduit au pur
$ymbole, puisque sa propre expérience peut être volée, manipulée, régulée
par l'Autre machiniste.

On peut à nouveau percevoir, comment la perspective d'une
virtualisation radicale confère à l'ordinateur une position pour
laquelle il est strictement homologue à Dieu dans l'occasionalisme
Malebranchéen : puisque l'ordinateur coordonne les relations entre
l'esprit et (ce que j'expérimente comme) le mouvement.
#+latex: \newpage
** Plateforme politique

Justifié par une défense de la parole des citoyens, le
politique s'est emparé de l'outil. Nous nous retrouvons avec de la
matière brute qui s'organise, savons ce qui donne
naissance aux débats et sommes en capacité de poursuivre le débat
en lui-même, aussi longtemps que nécessaire — ou tout
du moins la forme telle qu'on peut la lire sur nos écrans.
Malgré cela l'espace demeure étroit pour appareiller
des textes longs, des argumentaires développés et de la
libre expression.

La plateforme (dialoguea ou cartodebat, car c'est la même
chose) apparaît à ces début comme un antidote à Facebook ou
à Tweeter et leurs exploitations politiques, mais que ces
mêmes politiques continuent d'utiliser. Peuvent-ils
seulement s'en passer ? Ce que Régis Debray Debray14
appelle la politique de la petite phrase.

Lâchée la formule d'« acceptation sociale »,
il devient évident et obscène
qu'à l'intérieur des débats se jouent de grandes
parties de lobbyisme. Flagrant pour qui est approchés
par des fabricants de drônes qui scrutent si le marché est
mûr pour des livraisons par microlégers aéroportées à la double faveur de
la crise sanitaire et de la perspective de l'ouverture d'une
usine Amazon dans le Gard.

Dans la prolongation de ces mêmes débats, j'entends
trois opinions, qui aident à saisir l'idéologie
matérialisée au devant :

le but de l'être humain est d'acquérir plus de
confort ; Le design innove grâce au marché ; Les
militaires sont à l'origine de toutes les grandes
innovations.

Que penser de tout ceci ? Dès lors qu'il y a crainte pour la démocratie,
qui accuser ? Les networks ? les chiens de gardes ou la médiacratie
qui aurait pris parti ?

Les objectifs de départ, offrir des outillages aux animateurs
d'éducation populaire et des associations dans le respect
d'une charte éthique,
alors qu'ils sont nécessaires et urgents,
ont été mis de côté justifiés par des impératifs économiques,
par la menace de la concurrence sur le « marché de la participatique »
et par les relations compliquées vis-à-vis d'un laboratoire
positionné comme un passager clandestin venu gêner le
jeu du logiciel libre au lieu de le soutenir.

Des clients achètent un outil de communication pour
améliorer leur politique publique sur l'aménagement du
territoire. Dans une réunion, je fis remarquer que les
urbanismes anguleux et excentrés occupent une lourde
responsabilité dans le malaise social : l'absence d'un
centre circulaire, une place, une fontaine, un jardin, un
cœur, empêche les développements naturels en village et en
lieux de vies [fn::Les banlieues sont aménagées sans
 plan et sans liaison normale avec la ville. Les
 banlieues sont les descendantes dégénérées des
 faubourgs. Le Corbusier, La Charte d'Athènes, 1957, p. 24.]
      [fn::L'urbanisation [...] joue un grand
   rôle [dans les troubles psychiques] parce qu'il
   y a des quartiers où la culture entre difficilement
   [et entraîne une] société en grumeaux, [...] un
   grumeau social — Boris Cyrulnik gddi]. Les publics sont
drainés vers les centres, et se transportent en incessant
allez-retours, faute de vie culturelle développée sur
place. La réponse que je reçois en retour m'indique le
niveau de difficulté qu'il y a à se faire comprendre et m'afflige :
« Mais ceci favoriserait le communautarisme, et ça, c'est
les mosquées !»


Je n'ai personnellement aucune ire contre les communautés
religieuses. Devant une telle dégradation du débat, je
suis bien obligé de constater l'inflation de la tâche
à mener.  Tout ce qu'il nous est possible de faire à ce stade est
de revenir en arrière,
et à des notions antérieures aux quelques
clauses de collégialités sur lequelles nous nous
étions entendus pour
espérer progresser.
La tâche gonfle encore,
n'étant dès lors plus exclu
d'avoir recours à des rapports de forces
pour espérer se dépêtrer d'une part des simplifications
qu'engendrent ces raisonnements lapidaires,
et de l'autre, des complexités
produites par ces règles
imposées comme collectives mais par
des personnes qui s'y soustraient.
*** Le mouvement 5 étoiles
Cinque Stelle était à la souche un cybermouvement
MondeDiplomatique18.04.
8.7 millions de voix en 2013, 10.7 en 2018.
Ce sont les outils élaborés par le parti
afin de facilier la participation de
ses sympathisants et d'instaurer
une démocratie directe, avec la possibilités
de choisir ses candidats et ses représentants,
de déterminer les positions du parti
sur tel ou tel sujet ou de procéder
à des référendums qui ont fait son succès.

Le M5S promeut une conception de la démocratiee fondée sur le
principe de la délibération en ligne, qui conférerait à ses
décisions une légitimité plus grande.

Son utopîe numérique — organiser la consultation
des citoyens à travers des forums Internet —
a changé la vie politique.
Chaque italien peut désormais exprimer
son avis ou ses humeurs d'un simple clic,
sans la médiation, jugée forcément détestable,
d'un parti, d'un syndicat ou d'un journal.
L'approche post-idéologique du parti pourrait également avoir
joué en sa faveur. Pas de ligne préétablie ou ni de système de
croyance.

Les compétences remises en questions,
les faux pas et les scandales
confirmèrent que quelques clics
sur Internet ne suffisent pas à sélectionner
les meilleurs candidats ni à garantir
une parfaite transparence.

Les formations post-idéologiques ont gagné
en influence dans les pays d'Europe.
les partis sociaux démocrates se rabougrissent,
les conservateurs voient une partie de leur
base dériver vers l'extrême droite.
Dans cette phase historique, abjurer toute
idéologie peut paraître comme la formule
magique pour obtenir un large consensus électoral.

Il devient de plus en plus difficile de classer
les partis selon une logique gauche-droite.
Le terme même d'idéologie est désormais perçu
dans certain pays comme un gros mot.
L'idée qu'il faut tenter autre chose
en «dépassant les clivages» ne cesse de gagner
du terrain.

La production pléthorique de textes de M.Grillo
abordait une variété impressionnante de sujets.
C'est davantage un métadiscours sur une certaine
conception de la démocratie directe
qu'une prise de position sur chacun des sujets évoqués.
Le plus souvent, il s'agit d'imposer une vision du monde
manichéenne opposant un peuple pur à des élites corrompues.

Même les cinq «étoiles», censées symboliser les priorités
du mouvement – service public de l'eau, transports
en communs, développement durable, accès à internet gratuit
pour tous et protection de l'environnement — ont peu
à peu perdu leur signification.
Placées au centre du discours en 2005 et 2006, elles ont
repris du service en 2011 et 2012 avant de disparaître à nouveau.

Le M5S n'a « ni doctrine, ni support idéologique », son positionnement
est « très clair et adaptable : nous pouvons aussi bien
conserver l'euro que rompre avec lui, selon les intérêts
de la nation ».

L'Italie ayant toujours été un laboratoire pour
le reste de l'Europe
(fascisme dans les années 20,
instabilité politique dans les années 60,
gouvernement d'expert dans les années 90)
d'autres devraient s'inspirer,
pour le meilleur ou le pire,
de la stratégie du M5S.
** Dans l'enseignement supérieur et la recherche

Rouler sa bosse dans des diversités d'entreprises
de tailles et de secteurs, public, privés ou semi-public
est certainement formateur.
Avec le temps, on peut faire le constat des mutations et des
transformations des établissements sous la nécessité de
l'économie et du rendement, de la normalisation et des
processus dits de “qualité”.
Mais devoir poursuivre des recherches et prendre le risque
de ré-exploiter des travaux existants sans y être
officiellement encouragé peut parfois être déprimant.

La recherche scientifique
entretient des professions
qui sont le plus à même d'exercer
des transformations ou de véhiculer des idées.
Leur gestionnarisation et la normalisation outrancières
dont elles ont fait l'objet ont
à l'échelle européenne
des répercussions sociales profondes.


En décembre 2013, l'Académie des Sciences sonnait l'alarme.
La baisse constante des crédits dits « récurrents » n'était
nullement compensée par la politique de financement « sur
projets ».  La diminution des crédits de l’ANR impactait
sévèrement les « projets non-thématiques »
qui constituaient une source importante de financement pour
les chercheurs souhaitant s’engager dans des recherches
originales, très en amont des recherches thématiques
définies par des comités ayant tendance à financer
l’existant et donc à le reproduire.
Ces restrictions apportées allait mettre directement en
péril la vie d’équipes et de laboratoires qui avait mis du
temps pour s’établir et atteindre souvent le meilleur niveau
international.

« Une situation d’autant plus grave
    que l’on sait par expérience qu’un coup de frein
    important, même transitoire, donné à la recherche, a des
    effets néfastes importants pour de nombreuses années. La
    masse salariale est difficilement compressible, d’autant
    plus qu’il faut créer de nouveaux postes attendus par
    les jeunes générations. Néanmoins, les crédits des
    laboratoires ne doivent pas servir de variables
    d’ajustement » prévenait Joël Bockaert.


Le manque de poste et de crédit laissa le personnel en proie
à un désarroi néfaste pour l’ambiance des laboratoires et
conduisit à un fort ralentissement des activités de
recherches.

C'est à cette occasion qu'est lancé un débat sur la
précarité de l'emploi dans le secteur, débat qui
anticipait le recalage de la France dans la compétition
mondiale, les budgets de la recherche et de l'éducation
étant transférés à la police en un temps où les discours
sécuritaires se répétaient en boucles en réponse au phénomène
endogène du terrorisme.



Alors en thèse à l'observatoire de Paris,
Vincent Reverdy intervient le 20 Août 2014 dans un forum
qui coordonne les cellules régionales
en préparation de plusieurs semaines de manifestations :
« le but n'est pas de défendre des convictions personnelles,
le but est de converger peu à peu vers un argumentaire
commun et robuste, en commençant par déterminer quelles
sont les revendications du groupe.


Si vous me dites plus d'emploi et plus de moyens pour la recherche, je
serais extrêmement tenté de dire que le véritable problème n'est pas
là et que cela fait bien longtemps qu'il n'est plus vraiment là. Je
tiens à dire que ce genre de réflexion est peut être
thématique-dépendant, mais franchement ce ne sont pas deux  postes de plus
par an par section du CNRS qui vont changer quoi que ce soit...


Déjà, il faut prendre le problème à sa source : pourquoi voulons nous
des postes permanents ? Avant de communiquer, il serait bien que nous
ayons résolu cette question. Pour réduire la précarité chez les jeunes ?

Tout d'abord sans visibilité sur sa situation
personnelle, il est impossible de prendre des risques. Or
le risque est à la base, du moins il me semble, d'une
recherche audacieuse. Et la précarité limite, presque
structurellement, cette prise de risque. Nous ne voulons
donc pas de postes pour limiter la précarité, ou pour
"avoir des emplois de fonctionnaires bien au chaud"
(sentiment qui est présent chez une part non négligeable
de nos concitoyens), nous voulons des postes statutaires
pour prendre les risques les plus élevés possibles dans
nos recherches.

La précarité et la compétition pour les quelques postes
actuellement proposés n'entraînent pas la sacro-sainte
"excellence". Cela entraîne la sanction de l'erreur et force
les gens à travailler pour leur CV plutôt que de travailler pour
faire de la science. Il me semble qu'une recherche qui ne se donne
plus les moyens de se tromper est une recherche qui est en train de
mourir. Lorsque le facteur de pression atteint 30 ou 40, on prive
une génération entière de jeunes chercheurs de faire de la
recherche : qui peut se permettre de “perdre” ne serait-ce qu'une
semaine pour collaborer avec ses collègues (et je parle ici de
vraiment collaborer, je ne parle pas de monter un projet ou chacun
travaille dans son coin), aider ses collègues sur un point technique
ou scientifique, ou même prendre le temps de réfléchir ? Non plutôt
que ça, il faut finir à tous prix la dernière publication (si je
voulais être cynique je pourrais dire : que de toute façon personne
ne lira, à part les referees), débugguer le dernier morceau de code
ou terminer la dernière demande de financement. J'ai l'impression
que toutes ces tâches sont la transposition du divertissement
Pascalien au milieu de la recherche : ils nous détournent en
permanence de nos véritables objectifs. A tous les jeunes
chercheurs, je voudrais poser cette question : de quand date la
dernière longue discussion de trois heures ou plus que vous avez pu avoir avec
vos collègues concernant de vraies questions fondamentales liées à
votre sujet de recherche ? Et je ne parle pas de discuter de la
dernière courbe ou des derniers résultats. Je parle d'un vrai débat
d'idées sur une question de fond et notez qu'un vrai débat d'idées
nécessite la disparition préalable de tout argument d'autorité ou de
relation hiérarchique dans le cadre du débat. Si votre réponse est
de l'ordre de plusieurs mois, années ou même pire, jamais, je suis
désolé, mais c'est qu'il y a des problèmes plus urgents à résoudre
qu'une simple augmentation de budget ou de nombre de postes. De
manière cynique, encore une fois, j'irai même jusqu'à dire qu'au
point ou nous en sommes, la disparition complète des recrutements
donnerait enfin l'occasion aux jeunes chercheurs de faire de la
recherche, non pour construire un CV, mais pour faire de la science.

Je serais donc tenté de dire que si il est important de réduire la
précarité, ce n'est pas pour la précarité elle-même, mais parce
qu'elle est la condition préalable à une science audacieuse, à une
science qui ose prendre des risques et à une science qui accepte de se
tromper et de prendre le temps de se tromper.

Ensuite pourquoi serait-ce à l'Etat d'assumer cette charge
et pas aux entreprises ? Il ne s'agit pas d'opposer le
public et le privé. Les deux doivent assumer leurs rôles,
différents. Si certaines recherches peuvent effectivement
être menées par l'un ou par l'autre, d'autres, en
particulier les recherches plus fondamentales ne sauraient
être assumées par le privé pour la simple raison que cela
ne serait pas rationnel économiquement. Pour s'engager dans
la recherche, le privé a besoin de visibilité, il a besoin
d'évaluer les risques qu'il prend. Et c'est normal, il ne
s'agit pas de le blâmer pour cela. Or travailler à la
frontière de la connaissance pour essayer d'y effectuer des
recherches de rupture suppose de prendre des risques qui ne
peuvent, par nature, pas être évalués. Ne reste donc que
l'Etat pour financer ces recherches. Plus généralement, je
pense qu'une partie des problèmes actuellement rencontrés
provient du fait que, de l'extérieur, la recherche est
traitée comme une boîte noire qu'il s'agirait de financer
de manière uniforme. Or il n'y a pas une recherche mais des
recherches. On ne finance pas et on n'évalue pas une
expérience de physique des particules impliquant des
milliers de physiciens comme de la recherche mathématique
en topologie algébrique. Le financement sur projet est
utile, mais il ne peut pas tout faire. Donc si nous
demandons plus d'argent sans préalablement poser des
questions de fond sur le mode de financement, nous risquons
juste d'obtenir une nouvelle agence de financement pour
laquelle nous aurons la joie de pouvoir monter de nouveaux
dossiers.

“ La science est importante parce qu'elle est source
 d'innovations et qu'en tant que telle elle est un pilier
 pour l'économie et pour l'emploi ”.

J'ai pu moi aussi
 soutenir ce point de vue quand j'étais encore jeune et
 insouciant des conséquences implicites cela peut
 entraîner. Je suis désolé mais je n'en peux plus de ce
 discours. En faisant cela on dévalue et on dénature
 complètement la dimension culturelle de la science. Après
 la médaille Fields d'Artur Avila partout les journaux
 tentaient d'expliquer que la Mathématique était importante
 parce qu'elle était source d'innovation et d'emploi. Ce qui
 est interprété dans 99% des cas par : le but de la
 Mathématique est de créer de l'innovation et de
 l'emploi. Il me semble important d'arrêter d'avoir un
 discours infantilisant auprès de nos concitoyens et
 d'arrêter de se justifier sans cesse. Si une partie de la
 science a effectivement une dimension cartésienne et est ce
 qui permet de nous rendre comme “maîtres et possesseurs de
 la Nature”, une autre partie n'est pas justifiable en ces
 termes et s'inscrit dans une démarche culturelle : la
 connaissance pour la connaissance elle-même et non pour ses
 éventuelles applications qui, de toute façons, sont hors de
 portée au moment où l'on acquiert ces nouvelles
 connaissances. La relativité générale n'a pas été mise sur
 pied pour concevoir le GPS tout comme la mécanique
 quantique ne l'a pas été pour mettre au point le
 transistor. En tant que chercheurs, si nous abandonnons
 nous mêmes cette dimension culturelle de la recherche,
 alors je crois qu'il est illusoire de penser que quelqu'un
 d'autre viendra la défendre à notre place. La justification
 de la science à l'aune de ses applications a été maintes
 fois expérimentée par le passé et nous avons vu les effets
 que cela produit. Pour une fois, ne travestissons pas la
 recherche et ne trahissons pas la dimension culturelle de
 la connaissance, gardons la tête haute, élevons le débat et
 adoptons un positionnement non standard : nous avons
 beaucoup plus à y gagner qu'à y perdre. »
#+latex: \begin{flushright}
— Vincent Reverdy, le 20 Août 2014
#+latex: \end{flushright}
*** Manifestations
Six à huit mille manifestants à la porte d'Orléans le 17
octobre 2014, éconduits sur la place Vauban, au lieu de
mener le cortège devant l'Assemblée Nationale comme c'était
prévu.  La dotation des universités fit l'objet d'une coupe
budgétaire sans précédent, le budget national du CNRS en
2015 sera une peccadille de 160M€ tandis que la
défense reçoit une gratification de 3,8 Milliards à un
budget sanctuarisé. Le CIR (Crédit Impôt Recherche) accorde
5 Milliards au privé, dont la moitié va au bénéfice de
grands groupes qui n'hésitent pas à licencier du personnel
par milliers, comme Sanofi ; la crise fabriquée de toutes
pièces s'aggrave.

29 avril 2015, pendant une grève de Radio France, RTL prête
son antenne aux défenseurs de la rallonge budgétaire de la défense.
Il n'y a donc pas lieu d'être étonné si le front national
affiche un score historique, parce que la France profonde,
celle de la Creuse, représentative de plus de la moitié du
territoire, d'une génération encore en âge de voter à chaque
éclipse dans les campagnes, se fait manipuler par la machine
médiatique.

Vu que l'espace médiatique
disponible
sur Internet
est une cornucopia, les efforts des éditocrates
pour manipuler l'opinion y prennent souvent l'aspect de
ficelles assez grossières.



Les pouvoirs français participent largement à cet effort et
la dotation militaire doublée de l'approbation
majoritaire des députés sur les “boîtes noires”, déplace
le problème ailleurs : la manipulation consiste à compren\-dre
ce les gens pensent et ce qu'ils veulent pour leur présenter
le discours fait des promesses qu'ils attendent.
Et c'est ainsi qu'un État désengagé de ses citoyens peut se
transformer en un État qui se retourne contre eux.
*** Difficile (mais nécessaire) alliance

Il faut s'être heurté aux comportements particuliers qui
s'établissent dans les relations humaines à l'intérieur des
laboratoires et des entreprises pour comprendre comment
elles ont évolué.

On peut ignorer les privilèges attribués à des professions
de gens méritants mais on ne peut pas ignorer une culture
sociale de la déférence, du mépris ni la systématisation
des hiérarchies. On dirait une spécificité de français
cultivant verticalement l'arrogance mesquine.
Du jour où d'un jeune thésard
allemand j'entendis dire que l'autre n'était “qu'un ingénieur”, tandis que
lui était (déjà) “chercheur”, j'ai pris conscience que nous
étions entré dans un époque où les relations sont
naturellement tendues et qu'au lieu de pratiquer une dispute
avec élégance, esprit et bon goût, on préfère se jeter
des invectives à la figure.

« On peut le faire, [vous mettre à la porte, car c'est ce
qu'ils étaient en train de faire] car vous, vous êtes
temporaire, nous on est permanents » On dit communément les
“temporaires” et les “permanents”, pour désigner les
situations contractuelles des postes correspondant.  À mon
sens, ce témoignage est la preuve de l'inconscience quant à
la violence qui s'exerce.

Rétrospectivement, Alexander Grothedieck lui-même, dans
Récoltes et Semailles, témoigne d'avoir vécu des choses
semblables et dans des proportions insoutenables et qui lui
firent quitter sa place.

La recherche alterne entre temps longs et courts, entre
innovations parfois, et recherches et valeurs, voire
recherche des valeurs ce qui implique un regard lucide sur
une situation collective. Elle est aussi la responsabilité
de gens identifiés comme appartenant à une catégorie sociale
et jouant un rôle dans la société et qui l'ont peut être
parfois un peu oublié, conduisant à des situations où
s'animent des projets fantoches, sont rédigés des papiers
abscons et en perte de sens et que personne ne lira de toute
façon, ce qui entraîne des échecs à répétitions, un manque
de cohésion et de concrétisation, avec des procédures qui
s'éternisent. L'exemple illustre parmi tout ceci est celui
de l'ANR et de la déperdition d'énergie qu'elle a représentée
en 2014 : collectivement, ce sont des centaines de milliers
d'heures de travail suivies de recours auprès de la
CADA[fn::Commission d'Accès au Documents Adminisratifs].
Tout ceci précise le scénario
dépeint dans La Fondation Mark Gable Szilard48.





L'Europe, enfin, provoque une sécrétion de structures
supplémentaires, une adminisration normalisatrice et aveugle
avec son technolangage — un anglais appauvri destiné à un lectorat
francophone. Les attributions des budgets ? Il
semble difficile d'estimer sur quels critères elles sont
fondées. Une situation qui accroît la pression des lobbies et
favorise encore les passagers politiques clandestins.

La privation de la recherche entraîne des comportements
d'entreprise rapace.  Dans le cas du logiciel, l'histoire le
montre avec les situations absurdes où émergent des
licences spéciales, simplement pour palier  aux attitudes des
différents acteurs qui ne veulent pas jouer le jeu du logiciel libre.

Voilà pourquoi nous en venons à mettre en cause et désigner du
doigt des articles, des projets, des responsables,
et des équipes de recherches — qui, d'ailleurs n'ont jamais
eues très bonnes réputations.
Si le ton prend la tournure
d'un règlement de comptes, c'est justement parce que les
budgets acheminés, le problème n'est pas réglé.

On sait pourtant que c'est d'une alliance entre chercheur et
ingénieur Bloch13 que naît le succès des programmes et
lorsque deux plombiers travaillent ensemble et que l'un
demande à l'autre une clé de 12, vient-il à l'idée du
premier de lui demander “combien” ?
*** Les organisations

Οργανον : «instrument de travail», «de musique», «organe du corps».

L'organisation de la nature tend vers toujours plus de
compléxité et de structure.
On nous explique qu'à l'origine de l'univers une singularité crée des
particules subatomiques, regroupées pour former des noyaux elles
interagissent pour devenir des molécules qui plus tard entrent dans la
composition du vivant.
Si je décide de me déplacer vers la droite, toutes mes celulles vont
aller à droite. Et si toutes les cellules de l'organe meurent ou se
multiplient de façon anarchique à la façon d'une tumeur, l'être vivant
en est affecté.
Les organisations humaines sont des entités supra-individuelles.
Notre vocabulaire dispose de quantités de termes pour
qualifier les organisations humaines : associations,
comités, sociétés, collectivités, entreprises, instituts,
corps, équipes, compagnie, clan, colonie, commune, village,
équipe, alliance, ligue, club, assemblée, congrès,
conciliabule, chambre, conférence,
attroupement, rassemblement,
auditoire, jury, coterie...
tout une secrétion de structures qui englobe l'individu et
lui impose sa conduite.
Au cours du XXème siècle, la compléxité des assemblage de groupes
humains fait un bon en avant et les structures s'aggrandissent. Le
vocabulaire a déjà vu appraître le terme “d'administré". La raison qui
gouverne ces groupes tend vers plus de mécanisations. Si vous faites
appel à un peintre aujourd'hui, ça n'est pas un peintre qui vient,
mais un “auto-entrepreneur” ou une “société en bâtiment” qui existe
sous des mesures légales, doit déclarer et défrayer son ouvrage auprès
d'un centre des impôts, l'assurer auprès d'une compagnie d'assurance,
recevoir un paiement via une banque qui gère la transaction...

On pourrait croire que l'assemblée vote des lois alors qu'elle ne fait
qu'un vote de traductions dictées par l'Europe. On peut croire que la
gabégie qui prétend gouverner dirige ce pays : en réalité ils ne
comprennent pas ce qu'ils font, à l'image d'un chef d'entreprise qui
voit sa conduite dictée par la structure qu'il prétend diriger sous
l'égide d'un conseil d'administration dont les décisions elles-mêmes
fluctuent. Alors pourquoi prétendre qu'un gouvernenment “dirige" ?

Ce macrocosme comprend une méta-structure d'une complexité supérieure
à ce que nous avons connu jusqu'alors.

Venons-en à la R&D : dans ce contexte, la démarche de “qualité"
qui semble contaminer le secteur touche à un organe spécial : une
partie du cerveau suis-je tenté de dire. Comment s'interesse t-on à ce
que conçoit un homme ? Avec quel critère d'objectivité juge t-on de la
création d'un chercheur ? Qui peut prétendre juger ou évaluer de mes
recherches sinon mes pairs et moi-même ?  Et en dépit de toutes
qualités humaines ?

C'est ainsi que la masse dominante des personnes qui œuvrent au sein
du corps croient leur comportements fondés, tandis qu'ils se censurent
intellectuellement et qu'au lieu d'aborder de front le sujet, ils vont
se résumer à l'exécution d'un projet en contournant les difficultés
pour remplir les normes d'un contrat. Et je soupçonne qu'ils sont
nombreux dans les sciences aussi bien dures que molles à n'avoir
conscience que d'une fraction de cela, tant l'organe asservi la
cellule.

Comment aboutir dans ces circonstances ? En tout état de
cause, lorsque nous élaborrons un programme, une personne
doit en assurer la cohérence pour éviter l'inflation. Si
nous confions la direction à un organe mal défini, le
consensus qui l'emporte court le risque de ce remettre en
cause pour et par les propres raisons qui le font
exister. La nature du consensus est donc d'être certain de
savoir ce sur quoi il veut aboutir et non de créer des
entremises et des rationalités qui vont produire davantage de
mécanisations ; ce qui peut aller très au-delà du bien commun.

Une association qui défend la Recherche et se présente au
chevet de la nation délivre une dose homéopathique de
résistance à ce phénomène -- pour tenter de préserver un
système tel qu'il a existé. C'est aussi vouloir l'amputation
de l'amalagme d'organismes sécrétés à partir d'une même
souche entreprenariale, mais devenu depuis très largement
pluripotentes. C'est tout le problème d'un corporatisme
fédéral qui s'érige au dessus d'un État.


Constatons que 8 personnes sur 10 sont plongées dans leur
tablettes dans les trains, qu'on écoute de la musique sur
ces mêmes appareil alors qu'on rembobinait une cassette ou
déposait un diamant sur un sillon de vynille, que la télé
qui se regardait à plusieurs sur un canapée a été chassée
par des écrans individuels, qu'au détriment d'un téléphone
que l'on se disputait on a droit au rivetage social sur
facebook.  C'est une véritable optimisation du comportement
des cellules en chimie sur un système nerveux central.
Mais la diffusion des messages sur ce système
n'est
ni dirigée,
ni canalisée.
Elle est épileptique.

De cette lecture physiologique, on peut tenter de
comprendre les apories d'un système pour espérer exploser
ces normes, en repartant d'un design qui libère de l'emprise
des empires digitaux — auquel nos dirigeants ne comprennent
de toute façon pas grand chose.

Et là je ne parle pas que de Google mais aussi du cas
Elsevier — qui de manière générale a masqué
ce que devait être la littérature scientifique.

« There are many businessmen who own knowledge today. »[fn:: http://custodians.online]
** Le débat
Rétablir par le débat numérique la confiance et le respect dans le débat public,
un titre formulé gauchement et qui laisse une équivoque,
d'un article TheConversation.2019.02 signé de trois mains —
qui ont chacunes occupé des fonctions de directions dans leur
université — paru le 13 février 2019 dans The Conversation,
pendant la période où la France est secouée par le mouvement
des Gilets Jaunes qui revendiquent davantage de démocratie,
directe et participative.

#+begin_quote
« [...] Mais finalement, c'est quoi un débat ?
  quelles sont les règles ?
  quels sont les livrables ?
  quelles sont les attentes ?»
#+end_quote

[2019-03-26 mar. 09:18]
Les sous-bassements du raisonnement sont viciés.
On suggère ici que le débat est un jeu,
comme un jeu de plateau, avec un cadre déterminé
et des règles définies.

Regardez des enfants jouer, à un jeu ouvert :
une grande partie du temps est consacrée à définir, palabrer
sur ce qui est du jeu et ce qui n'en est pas.

Autrement dit, à définir la matrice,
le nid dans lequel peut éclore le jeu,
au sens plus strict,
tel qu'il est réputé être défini, circonscrit par des règles.

Quand on parle de livrables,
ça suppose que le schème fondamental pertinent
est celui d'un processus,
une machine, avec des entrées et des sorties.
Modèle qui,
pour être celui qui domine les esprits contemporains
dans notre société,
conditionne de façon très étroite ce qu'il est possible de penser.
En fait, il confine dans les couloirs d'un labyrinthe.
Je soutiens que les crises actuelles
sont justement les hurlements contre cet enfermement.
Une plainte qui ne sait pas exprimer
de quoi on souffre,
mais qui manifeste que l'on éprouve une douleur.

Cet inconfort est général,
dans nos sociétés.
Dans le registre particulier du «débat»,
cet inconfort consiste en ce qu'on a beau échanger des propos croisés,
quelque chose de fondamental ne fonctionne pas,
on ne ressent aucun soulagement.

En fait, il n'y a pas débat,
si le débat est bien compris,
comme à mon sens toute comunication doit être comprise,
comme consistant à établir un jeu collectif
— le temps consacré à dire ce qui est du jeu,
mais qui lui-même suppose
que l'on s'entend déjà suffisamment
au préalable —,
à définir le cadre sémantique
dans lequel peuvent émerger les catégories convenues
qui forment les jetons de jeu syntaxique du débat.

Ici,
la sémantique est l'émergence de formes bien définies,
bien contrastées, au sein d'un magma initial, un chaos,
et non pas,
comme la considèrent les esprits conditionnés
par la vision en machine,
quelque chose qui viendrait se déposer de façon semi-magique
sur un donné initial fait d'atomes syntaxiques.

En résumé,
je trouve que le débat enclenché par ce texte,
est entaché des vices qui font que le débat est partout invalidé
dans nos sociétés :
il verrouille une représentation de la réalité
comme un système formel,
et somme les autres de répondre strictement dans les étroit couloirs
qui en résultent.

Évidemment, tout le tour de passe-passe
consiste à ne pas énoncer ce cadre sous-jacent.
Il reste dans le non-dit, largement dans l'impensé,
si bien que personne ne semble en capacité de le dénoncer.
En fait le tour de prestidigitation n'est même pas conscient
pour ceux qui en jouent.

La conscience que l'on en a est tout à fait partielle :
on clame partout que toutes choses sont des processus,
des machines,
des jeux de règles.
Mais évidemment, nulle part on ne développe effectivement
les conséquences de ce postulat,
car il est en contradiction frontale
avec le simple fait que nous soyons en vie,
et en train de nous demander
ce qu'il convient de faire dans notre situation,
c'est-à-dire que le problème concret qui nous est posé
est celui d'un choix libre,
en rupture avec un dogme de déterminisme mécanique
postulé avec la notion de machine.

L'aveuglement frappe tout autant
ceux qui sont en position de force,
et jouissent donc de l'idéologie de la machine ambiante,
que ceux qui en souffrent,
il les frappe même plus,
parce qu'ils n'ont aucune intention de voir changer
le monde qui leur donne cette position avantageuse,
et qu'ils se targuent de mieux comprendre que les autres.

Notre premier de cordée
trouve tout à fait normal d'être au sommet,
étant donné sa supériorité de sang.


#+begin_quote
« Et que peut apporter le numérique dans un débat citoyen ?
Il est bon de rappeler
que le débat existe
depuis très longtemps dans nos sociétés,
mais sa forme actuelle
n'est plus adaptée à nos sociétés modernes.
Aujourd'hui le débat , doit reprendre tout son sens et son utilité,
il doit être un véritable outil de gouvernance.»
#+end_quote

- [2019-03-26 mar. 09:45] La
  “gouvernance"[fn:gouvernance] est un mot qui à lui
  seul, clame que la société est une machine, et que quoi
  qu'il se passe, il ne s'agit que de consacrer cette
  idole.


#+begin_quote
«Il ne s'agit pas d'en faire un outil de démocratie participative,
mais bien réellement un moyen de produire
des propositions concrètes au service de tous.»
#+end_quote

- [2019-03-26 mar. 10:07]
  Pour moi cette phrase est creuse.
  Tout d'abord, elle procède comme si
  « démocratie participative »
  était une substance parfaitement définie,
  formellement définie dans l'absolu.

  Ensuite, elle exprime
  que « produire des propositions concrètes »
  serait fondamentalement autre chose
  que cette « démocratie participative ».
  J'ai beaucoup de peine à imaginer
  ce que ça peut vouloir dire.

  De plus, ces « propositions concrètes »,
  de nouveau, excluent que le débat
  puisse consister à définir le jeu auquel on va s'adonner,
  tout simplement quel est le problème,
  à quoi il peut être pertinent d'apporter des « solutions »
  — si seulement une situation doit se réduire
  à être conçue en termes de problèmes et de solutions.
  On retrouve exactement la question
  de la différenciation progressive d'un jeu,
  au sein d'un groupe d'enfants,
  évoquée plus haut.

  Dernier point, « au service de tous »,
  est une formule creuse,
  comme ce sera dit plus bas d'ailleurs,
  comme si le service de tous était quelque chose d'unitaire,
  si facile à trouver,
  comme si cette formule pouvait même recouvrir quelque chose de définissable.
  C'est une fiction complètement déconnectée de la réalité.


«  Confiance et respect
  doivent être les fondements de ces nouvelles formes de débats.
  Si le débat présentiel reste indispensable,
  le débat numérique est désormais à la portée de tous.»

- [2019-03-26 mar. 10:16]
  C'est faux.
  Tout le monde, loin de là, n'accède pas au débat numérique.

«Les réseaux sociaux ne sont-ils pas au final
une source incontrôlée des débats ...»

- [2019-03-26 mar. 10:16]

  Source incontrôlée de débats ?
  L'emploi du mot source est maladroit.
  Un lieu de débats incontrôlés, peut-être ?

«... avec son lot de bonnes et mauvaises pratiques.
 Un grand débat rassemble un grand
 nombre de discussions et de
 participants.»

- [2019-03-26 mar. 10:18] Même cette phrase est filandreuse.

  Un grand débat, on pourrait arguer,
  doit essentiellement être un,
  c'est-à-dire consister en une discussion.

« Est-il possible in fine
de gérer et vraiment prendre en compte ces nombres [de « débattants » ] ?
Ne sommes-nous pas confrontés au big-data des décisions ? »

- Charabia. Le recours à une gestionnarisation supplétive
  ne nous sera d'aucun recours.


«  Le débat ne fait pas forcément le jeu du pouvoir politique
  qui est tenté de le contrôler ;
  Une dictature c'est «ferme ta gueule»,
  une mauvaise démocratie c'est «cause toujours».
  Mais le déroulement du débat le fait échapper à tout contrôle.
  Le déroulement d'un débat
  vient de l'addition des contributions de tous.
  Personne n'en a la maîtrise
  car tout le monde l'influence
  par ses interventions et absences d'interventions.
  Le débat doit pouvoir repartir de discussions passées.

C'est pourquoi , il faut des dispositifs
qui assurent que chacun conserve la propriété de ses idées. »

- [2019-03-26 mar. 10:22]
  Ne faudrait-il pas parler plutôt,
  plus fondamentalement,
  du fait que l'on puisse identifier, nommer les intervenants,
  encore que cela ne départisse pas du fait qu'à un certain point,
  il faut aussi pouvoir faire des contributions anonymes ?

  Il y a une dialectique de la transparence et de l'opacité,
  qu'il sera important de formuler explicitement.

« et puisse choisir quand et comment intervenir ».

- [2019-03-26 mar. 10:23] Phrase inepte.
  Propos inepte
  au regard de ce qui a été dit plus haut,
  puisque le débat y était de fait constitué
  de la faculté libre d'intervenir de tous.
  Autrement dit, le propos est erratique.

« Par chance, les mauvais débats se révèlent facilement,
  ils sont signalés par des participants eux-mêmes.
  Ils se plaignent de ne pas pouvoir parler,
  ne pas être écoutés, être perdus, oubliés,
  récupérés, isolés, invectivés, impuissants
  face aux parties prenantes,
  et dépossédés de leurs idées.»

- [2019-03-26 mar. 14:03]
  On pourrait dire que la première fonction d'un échange,
  d'une communication, d'un débat,
  est d'établir com\-me un fait collectif
  l'existence de chacun des protagonistes.

  S'il n'y a pas des individualités qui communiquent,
  il n'y a pas de communication.

  J'ai expliqué comment le fait que l'on considère
  qu'il existe un «référentiel absolu» de connaissance,
  un universel,
  bafoue par avance l'existence même d'autrui.
  Autrui est au mieux un diverticule de mon référentiel universel.


« Les mauvais débats démocratiques
  se révèlent aussi pour des raisons indépendantes des citoyens :
  ils ne se pratiquent pas aux différentes échelles,
  qui consistent en des débats,
  locaux, sur les territoires, dans des communes,
  à l'échelle régionale, nationale et internationale ;
  Ils n'ouvrent pas à d'autres formes d'association
  et de participation à la politique publique ;
  Ils ne conduisent pas à un changement de comportement
  des administrations et des politiques.»

- [2019-03-26 mar. 14:06]

  Tout ceci sonne comme des vœux pieux.
  Il y a déjà eu, ne serait-ce qu'une fois,
  des débats qui satisfassent ces conditions ?

«  C'est pourquoi la CNDP insiste
  pour que le grand débat donne une place à chacun,
  que les participants et les parties prenantes se mélangent
  et que le débat soit multi-échelles avec la participation
  d'élus, d'administratifs et de citoyens.

Le numérique, un médicament ou un poison?

  Il est dangereux de se servir d'outils de débat numérique
  qui n'ont pas été qualifiés[fn::Le terme qualifié (sens contraire
«disqualifié») reviendra très souvent dans les discours sur
l'ingénierie des débats pour dire : qualifier des termes, les étiqueter.].»


- [2019-03-26 mar. 14:07]
  C'est quoi, un outil qualifié ?
        (L'emploi pour autorisé, reconnu et valable est rare)

  Pour moi, la question soulevée gauchement ici,
  c'est le fait que tout un chacun puisse s'assurer
  de la concordance entre la version de la trace des débats
  dont il dispose,
  et celle qui est affichée publiquement.
  Entre les archives publiques, et celles qu'il aura vérifiées lui-même.


«  Cela s'apparente alors aux réseaux sociaux,
  et nous voyons bien les ravages de ces outils peuvent provoquer !
  On ne met pas sur le marché un nouvel avion
  ou un nouveau médicament
  sans une batterie de tests
  et sans l'aval d'agences indépendantes.
  Curieusement l'ingénierie du débat public numérique
  n'est soumise à ce jour au contrôle d'aucune agence,
  alors qu'on a déjà vu des conséquences de l'usage du numérique
  dangereuses pour la vie démocratique.


- [2019-03-26 mar. 14:09]
  Disons : un simulacre de batterie de tests, pour les médicaments.
- [2019-03-26 mar. 14:10]
  S'il n'y a qu'une agence de plus
  qui puisse être la solution à tout ce qui est «dangereux pour la vie démocratique»,
  la charge sur les écosystèmes,
  est encore accrue d'une puissance.

« Demain, il faudra qu'une agence ait
  pour mission l'agrément des outils de
  débat public.  Ce grand débat va
  fonctionner véritablement que s'il
  parvient à mobiliser la participation
  d'institutions qui conditionnent une
  confiance. »

- “Le conditionnement de la confiance”,
  “l'apport de la confiance”, autant de formules
  qui raisonnent avec les mots de l'antipathique ministre Blanquer
  et de son “école de la confiance" et dont on ne sait en ces termes
  si on entend évoquer une relation à soi ou aux autres.

À l'article de Latour Avoir à nouveau confiance dans les institutions
Latour2012enquete peut-être ?


« Indépendamment du débat,
par exemple les notaires
exercent leur profession sur tout le territoire
comme tiers de confiance,
ils sont en réseau et ils maîtrisent les outils numériques. »

- Il faut avoir fait l'expérience directe de l'empêtrement que peuvent con\-
  naître les notaires avec leurs propres suites logicielles compliquées
  pour comprendre qu'il n'y a pas de maîtrise.

  Ce passage de Jean-Pierre Dupuy prête le flanc à la critique,
  mais je le citerai quand même :

  « Nombre de Philosophe [pensent que] Le rêve de
  Descartes, « se rendre comme maître et possesseur de la
  Nature » -- a mal tourné et il serait urgent d'en
  revenir à la maîtrise de la maîtrise.
  Je crains qu'ils n'aient rien compris. Ils ne voient
  pas, que la technologie qui se profile à l'horizon vise
  précisément à la non-maîtrise. L'ingénieur de demain ne
  sera pas un apprenti-sorcier par négligence ou
  incompétence, mais par finalité. »
  Ce que le fantasme de l'intelligence artificielle concrétise.


«  Les universités ont une culture du débat de savoirs spécialisés
   et les médiathèques,  proches des citoyens
  savent leur donner accès à des connaissances adaptées à leurs besoins. »

- [2019-03-26 mar. 14:13] J'ai pourtant tenté de débattre
  du sujet avec l'un des auteurs : en quoi il y avait des
  connaissances dans les médiathèques, adaptées à nos
  besoins et ironiquement, combien de kilo-connaissances
  par jour étaient recommandées ?

«  Avec ces structures,
  pourquoi ne pas lancer des recherches et des actions
  pour qualifier des outils numériques
  favorisant la confiance et la participation du citoyen
  qui, assuré du respect de ses idées,
  aiguise son esprit critique,
  mobilise sa créativité,
  et tire profit de celles des autres ?

Rétablissons le débat,
dans la confiance et le respect de chacun,
et avec une volonté collective
d'aboutir à un changement profond de notre société
pour prendre part aux décisions de demain. »


L'article s'achevant ainsi, on ne su
dire ni quelles recherches, ni quelles
actions, pas plus que de quelles
décisions il était question.
Les discussions autour de l'article se
prolongèrent sur Dialoguea, puis
celui-ci offrant un espace jugé trop
étroit par l'un des participants pour
rédiger son propos, par mails adressés à
une vingtaine de participants, commençant
avec la relance suivante.


« La pathologie a de tout temps été le point de départ de la physiologie,
non l'inverse. »

- [2019-03-26 mar. 10:32]\\
  Observation juste, mais qu'il faudrait raffiner.

  En effet, on découvre un fonctionnement physiologique,
  qui va de soi en conditions normales,
  le jour où il défaille.
  « Je ne savais pas que j'avais un os là ! »

  Mais cette façon spécifique de voir la maladie, ou la santé,
  procède d'une manière très typiquement occidentale
  de considérer le monde.
  Une façon guerrière.
  Une façon qui projette de façon directe
  une identité entre un symptôme et une substance.
  Elle substantialise le symptôme,
  elle recherche un agent, un facteur
  déterminant analytiquement —de façon linéairement indépendante— le symptôme.
  Il en résulte qu'au lieu de cultiver
  les conditions d'une bonne santé, d'un bien-être, d'un mieux-vivre
  (penser notamment à Bertrand de Jouvenel),
  on entre dans une escalade de l'armement avec la maladie,
  les attaques.
  Le plus grave ce-faisant est que l'on se représente la vie,
  et tous les phénomènes vivants de façon erronée.
  (Lire Eliot Coleman, de significatif là-dessus.)

  Cette conception, [...]
  déjà commentée sur le thème du personnage de Robinson Tournier72,
  des services écosystémiques,
  sur les solutions incontournables,
  énoncées par Michel Serres,
  Philippe Descola,
  Bruno Latour,
  pour ne citer que des français qui ne soient pas des moindres :
  pour «sauver la nature»
  (qui, jusqu'à une période récente,
  n'a pas eu besoin des hommes,
  ni d'être sauvée en quoi que ce soit,
  elle s'est faite toute seule),
  la seule solutions qu'ils envisagent,
  et qu'ils paraissent chacun avoir inventée tout seul,
  c'est de donner une représentation politique, juridique, économique
  —avec un marché de...—
  à chaque entité vivante !
  Ils ne semblent même pas ébranlés de ce que l'inventaire des entités vivantes
  est sans fin.
  Ni que si «chaque entité vivante»
  doit engraisser représentants politiques, avocats, juges, traders, etc.,
  la nature s'effondrerait instantanément sous la charge.


« Dans la grande manipulation nationale, que les distraits continuent
à nommer “débat", est présente toute la pathologie de ce qui prétend
être un débat tout en le rendant impossible. J'en ai indiqué quelques
caractéristiques empiriquement observables (ce qui entre scientifiques a
son importance). Entrée réservée à des gens choisis en fonction de leur
conformité avec une certaine idéologie, questions préparées et
pré-"visées" par les préfets, impossibilité de répondre à la réponse du
performer (pas de droit de suite), et j'ajoute à ce que j'ai écrit
tout à l'heure, interdiction aux figurants (non "participants") de
discuter entre eux.

Forme: pré-sélection, rétrécissement du "discutable", schéma de
communication en étoile: le /performer/ est le HUB qui concentre toute
proposition formulée.
De fait, nombre d'attributs de forme que doit respecter un
débat circulent déjà dans vos contributions. On pourrait les appeler
paresseusement, la dimension grammaticale (les formes canoniques des
énoncés admissibles).

Ensuite vient la sémantique, qui évidemment interfère, car la
séparation grammaire/sémantique n'est pas pure.
La sémantique d'une langue est l'ethnographie d'une culture (de cette
culture-là): or, la culture c'est du sens, mais c'est du sens porté
par des individus et des groupes; Et les uns et les autres peuvent
avoir (ont très souvent) des intérêts non seulement différents mais
contradictoires.

- [2019-03-26 mar. 14:17]  Je ne suis pas du tout d'accord
  de cette partition entre syntaxe et sémantique.
  Donc les bases du discours, du débat enclenché ici
  divergent pour moi.

Et là ça se complique. Parce que les contenus sémantiques sont des
produits de processus. Exemple: on ne propose pas (comme suggère, je
crois, Corinne), que le débat consiste en la tentative de résoudre un
problème (question de problem-solving), avant que les agents aient
réussi à définir (construire) au préalable le problème dont il va s'agir
(problem-setting), qu'il s'agira de résoudre.
Dans les débats en sociétés réelles, les problèmes possibles sont liés
aux agents eux-mêmes: dans une certaine situation, le "problème" des uns
n'est pas (peut ne pas être) celui des autres.

- [2019-03-26 mar. 14:19]  Ce qui me paraît plus radical encore,
  c'est que la donnée de base est l'étrangeté
  des mondes des uns et des autres.

  Ce n'est pas qu'ils n'ont pas le même problème,
  dans une sorte de cadre universel
  où l'on pourrait poser les problèmes des uns et des autres.

  C'est que leurs cadres sont étrangers les uns aux autres,
  et avoir un aperçu du cadre d'un autre demande beaucoup d'interaction,
  et ne se ramène pas à la transmission d'un message.
  C'est plutôt le changement d'un état,
  d'une manière d'être au monde.

  On ne comprend quelqu'un que parce que l'on est en mesure
  de transporter, de façon figurée,
  son expérience sur notre propre personne.
  On se figure très mal, ou pas du tout,
  ce que représente une expérience donnée
  (se faire attaquer et brutaliser inopinément dans la rue),
  que lorsqu'on a pu en tâter, ne serait-ce qu'en aperçu.

- [2019-03-26 mar. 14:22]  Une bonne discussion ramènerait de nouveau
  à cette partition entre ce qui relève de valeurs
  et ce qui relève de la technique,
  qui était au cœur de la conception de la démocratie athénienne.

  Ligne de partage que sapait consciencieusement et radicalement Socrate,
  raison profonde pour laquelle,
  dans mon interprétation,
  la démocratie lui a fait procès.

  Nous avons suivi la voie du martyre,
  et nous avons réalisé l'avènement de la société socratique,
  entièrement technique.

« Or la façon de construire le problème (de le définir) est strictement
dépendante des intérêts des participants. Ce n'est plus une question de
forme (des arguments et des rapports entre arguments), c'est une
question de d' entités sociales, d'intérêts et de conflits entre elles et
entre eux.

La vraie difficulté de l'efficace du numérique, au-delà de la forme,
vient de ce l'on ne sait pas définir une équidistance entre les intérêts
en conflit. La triangulation par un tiers neutre est impossible (un dieu
en surplomb ferait l'affaire), de par la nature même de la situation:
j'ai intérêt et je veux ce que tu ne veux pas parce que ça va contre ton
intérêt. »

- [2019-03-26 mar. 14:26]  Ce paragraphe semble prendre pour bon pain
  que le débat peut entièrement se résoudre sur un terrain formel,
  dans le registre des arguments.

  Il ne tient pas compte de ce qui semblait le propos antérieur,
  à savoir qu'il faut que les participants s'engagent de toute leur existence
  dans l'échange,
  qu'ils mettent les mains dans le cambouis, dans la terre.


« Intérêts particuliers est l'expression péjorative que l'on peut lire
  dans l'article. Mais tous les intérêts sont particuliers (aucun
  n'est "quelconque". Le problème pratique dont la solution est
  toujours "sale" du point de vue logique (parce qu'aporique, ou mal
  fondée), est que l'élaboration d'un compromis entre intérêts
  particuliers — compromis dont le cas canonique est celui de
  l'élaboration d'un "intérêt général", ou d'un "bien commun", autre
  expression dont l'apparente évidence et bonté nous aveugle), /n'est
  pas une question logique/ ni de forme mais bien *une question de
  rapport de forces*. Et là, toute la grammaire s'évapore[fn::Dans un
  texte sur l'argumentation des gilets jaunes, Hervé Marchal
  identifiait des formes d'argumentations jugées très “opérantes",
  substantialisant les discours sans prendre en compte une
  argumentation finale qui ne soit pas de la communication : la
  violence, elle aussi est très “opérante" au sein des débats, et avec
  des résultats très prédictifs : tapez suffisamment fort sur la tête
  et tout ceci devient hors de propos.].

« Reste à construire une proto-logique du rapport de forces, ou des rapports de forces. »

- [2019-03-26 mar. 14:28]  Et cette proto-logique,
  qui se replie promptement dans le registre formel
  qui juste au-dessus semblait dépassé,
  montre que la pensée n'est pas aboutie.


Réponse de l'un des auteur de l'article :

« ma première remarque: si on peut autonomiser relativement des formes
        de débat, elles ne sont jamais déconnectées de leur objet: défendre
        un point de vue c'est défendre sa vie, ses valeurs (ce qui est très
        connecté).

- [2019-03-26 mar. 14:30]  Oui, mais on attend d'un
  intellectuel qu'il formule ses idées de façon claire,
  constructive, intéressante.

«  ma deuxième remarque : il faut reprendre la question de la
         démocratie athénienne à la base
         et celle de la sophistique vs. la philosophie. »

- [2019-03-26 mar. 14:34]  Pareil, discours entendu,
  fait de termes lapidaires réputés transporter en eux la substance de leur sens.
  Mais en clair, qu'est-ce que vous voulez dire ?

«  ma troisième remarque: le dispositif d'écoute dont parle la belle
         Chantal Jouanno n'est pas mis en place, le fait que l'on parle à
         quelqu'un mais devant tous les autres change tout. La médiation du
         collectif qui peut prendre des formes très différentes, est à
         analyser,  (Psychologie des foules Freud, G. Le Bon qui a été une
         lecture et de FREUD ET DE HITLER, Zola, Balzac, Flaubert,
         psychologie de masse du fascisme Reich, Spinoza et la peur des
         foules etc.)

« la manœuvre politique actuelle consiste à subststituer la “forme
        débat" au débat contenu.»

- [2019-03-26 mar. 14:38]
  Le débat contenu, signifie dire un débat en contention.
  Le débat-contenu, serait une apposition qui signifierait
  un débat qui mettrait en œuvre véritablement un contenu.

« C'est une sorte de sophistique à grande échelle, qui finit par
        fonctionner toute seule [...]
        Ma quatrième remarque: le numérique il faut le prendre à sa racine.
        Il doit pouvoir libérer une vraie argumentation calculatoire que les
        dites "Humanités numériques " sont à mille lieux de considérer.
         Les milliers de débattants en puissance doivent eux-mêmes pouvoir se
        libérer de la sophistique du calcul au profit de sa rationalité. »


- Qu'entend-on exactement par sophistique ?
  on attend d'un intellectuel  qu'il formule ses idées de façon claire,   constructive, intéressante,
  mais ce  propos nous égare.
- Le simple fait d'entretenir à son esprit
  l'idée d'une argumentation calculatoire
  manifeste pour moi une incapacité rédhibitoire
  à concevoir quoi que ce soit d'utile pour notre monde.
  Leibniz et sa characteristica universalis,
  sont l'une des formes marquantes de cette illusion,
  dont notre histoire est pavée.


- [2020-06-23 mar. 00:33]
  [...] La politique est ultimement à propos des valeurs ; Mais aussi,
  que ceux qui créent de vaste systèmes bureaucratiques n'admettront
  presque jamais quelles sont leur valeurs (ceux qui prétendent
  que c'est la rationalité le font pour dissimuler ce que leur
  plus grande valeur est réellement. Et, tels les barons-gredins
  du dernier siècle, insisterons qu'ils agissent au nom de l'efficacité
  ou de la "rationalité". Mais ce langage se révèle toujours intentionnellement vague,
  et parfois dénué de sens. Le terme "rationalité" est un excellent
  cas d'étude ici. Une personne "rationnelle" est quelqu'un capable
  de faire des connections logiques élémentaires et qui atteste
  d'une réalité non fantaisiste : en d'autres termes, quelqu'un qui n'est pas fou.
  Quiconque prétend baser sa politique sur la rationalité — et ceci
  est vrai à droite, comme à gauche — prétend que quiconque est en désaccord
  avec eux pourrait bien être mentalement dérangé, ce qui est la position
  la plus arrogante pour laquelle on puisse opter.
  Ou bien ils utilisent le terme "rationalité" comme synonyme d'"efficacité"
  en se focalisant sur le comment ils veulent aller vers quelque chose
  car ils ne veulent pas parler de quoi il est en définitive question
  d'aller vers.  Étant entendu qu'il est difficile de dire “irrationnel
  pour des acteurs pour qui la participation civique, les idéaux politiques,
  et le bien commun ne sont pas des valeurs en elles-mêmes, mais qui
  voient les affaires publiques uniquement en terme d'avantage personnel"
  Graeber2015.


[ Pour restituer le débat dans son originalité, il m'a semblé nécessaire
 de conserver cette intervention : ]


« Merci à José pour son intervention "poil-à-gratter" dans un débat
numérique pour le moins assez homogène. Il nous permet de poser
des questions sur la technicité et les limites de l'outil aidant
mais aussi sur la capacité des débatteurs à rester maîtres de
leurs émotions dans leurs réponses. On peut alors s'interroger
sur un rôle numérique lors d'un échange qui pourrait s'enflammer...
je me permets quelques réponses aux uns et aux autres:


1. outil => en effet, il faudrait que les débats restent au
   niveau de l'outil ( si extérieur : comment "nourrir les IA"? et
   leur permettre de l'améliorer?)

2. outil => en effet, il faudrait un espace concomitant aux
   colonnes de dialoguéa pour un chat complémentaire avec un CHATBOT
   dont on pourrait lui donner un rôle quelconque pour le moment,
   pour tester son impact/ses interventions sur les débatteurs et
   continuer à "nourrir " les IA.

3. qualité => Il est vrai que les distorsions
   culturelles/politiques/etc ont un impact négatif sur tout échange
   entre 2 personnes car elles peuvent être utilisées à mauvais
   escient . Nous pourrions alors parler de manipulations
   antagoniques possibles . Ici viendrait le rôle que pourrait jouer
   un outil numérique d'intelligence artificielle couplé à un agent
   conversationnel avec une technologie de tiers de confiance pour
   remettre du liant (le sujet du débat avec son objectif,
   résoudre un problème), garder la dignité de tous les débatteurs,
   traiter leurs propositions au final (une sorte de lois Asimov du
   débat).


- [2019-03-26 mar. 14:47]  Je renvoie à mes autres commentaires,
  de nouveau, je me sens dans une telle divergence avec ce qui est dit là,
  et ce qui est dit là est tellement peu fondé,
  explicité,
  qu'il ne permet pas une réelle discussion.

  Ce genre de rédaction témoigne d'un mépris profond pour le lecteur,
  on lui prend du temps,
  et lorsqu'il est au bout,
  il comprend qu'il n'a plus qu'à faire la totalité du travail, seul.

  Ce sont les fondements même du débat qui ne sont pas satisfaits ;
  Et en l'occurrence,
  ce sont les bases même de l'écriture académique,
  qui établit des conditions au débat argumenté,
  qui sont passées outre.

  Ennuyeux étant donné les personnes qui écrivent.


L'auteur de l'article poursuit :

« la notion de débat quelconque est une référence au
        philosophe Berkeley discutant du statut du triangle
        quelconque (celui qui a pour propriété particulière de
        n'avoir pas de propriétés particulières)

Je suis évidemment intéressé par les limites de cet outil. Il
est par exemple adapté à des petits groupes ayant une
préoccupation homogène. Il peut facilement précéder ou suivre
un débat en présence. Il est difficile à utiliser quand
personne ne se connaît déjà. Quand des personnes se
connaissent, il peut être utile de lui associer des outils de
Chat ou de mail. Mais est-ce vraiment bien de permettre des
apartés? »


Réponse [2019-03-11 lun. 11:42] \\
Tentative de résoudre quelques malentendus.

1. “Le numérique n'est pas du tout pour José un contre
   pouvoir mais une manière lamentable de masquer des
   manipulations": je ne pense pas cela, et ne l'ai pas
   écrit.  Pas plus que le présentiel, le numérique n'est
   pas /par nature/ une manière de masquer des
   manipulations politiques ou autres. L'un et l'autre
   peuvent l'être, ou non, selon les conditions de leur
   instauration et de leur déroulement.

   Dans les
   circonstances présentes, le grand “débat" qui sert
   d'arrière-plan à la “conversation" est une opération
   géante de manipulation, présentielle, avec ces
   one-man-shows inadmissibles en démocratie, dont les
   règles et les modalités sont entièrement viciées :
   stricte sélection des participants en amont,  “questions"
   préparées à l'avance sous le contrôle des préfets, pas
   de “droit de suite" après les longues harangues du
   président en “réponse" aux “questions", chorégraphie
   soulignant à l'extrême la dissymétrie des statuts des
   “participants", etc. Les trois mots entre guillemets les
   ont mérités: ce ne sont ni questions, ni réponses, et il
   n'y a pas de participants, seulement de lamentables
   faire-valoir.  En somme, événement présentiel, sans
   doute, mais /pas un débat/.  Ces grands cirques ont un
   pendant numérique, avec le recueil de “questionnaires"
   et une plateforme...  informe, dont les règles et les
   résultats sont entièrement contrôlés par le pouvoir
   politique, à son profit exclusif.  Pour le numérique,
   selon les mêmes critères implicites ci-dessus, le
   problème qu'il faut poser et construire en détail est
   celui du statut de “l'arène" dans laquelle se
   réunissent, se confrontent, coopèrent, s'opposent, pour
   définir

   - qui la conçoit et contrôle?
   - quel est le problème qui peut être construit en commun, avant de tenter de le résoudre (en commun)?
   - comment se règle l'accès à l'arène et qui le règle?
   - Comment gère-t-on les distorsions inévitables résultantes des    différences de statut politique (le personnel politique
     au sens large vs. citoyens lambda), de capital social    (entre les classes privilégiées avec l'assurance que
     leur donne ce capital (v.g.  entre l'avocat, médecin,    etc., et le prolo chômeur de longe durée...), et
     (corrélatives), différences de capital culturel    (utilisation de la langue, capacité d'expression, de
     synthèse, d'argumentation)...

   Si on ne tient pas compte    des handicaps, tout débat,
   présentiel ou numérique,
   devient manipulatoire, parce qu'il permet l'exercice
   subreptice de diverses formes de pouvoir de certains
   participants sur d'autres. Et moins on en est conscient,
   plus nocives sont les dissymétries.  Ce sont elles qui
   vont déformer les dimensions de crédibilité d'une
   parole, du domaine de validité d'une proposition, de la
   légitimité d'une inférence: et non pas les seules
   questions de logique formelle.  Ce seraient plutôt des
   problèmes relevant des “logiques concrètes", qui
   admettent bien des formes non orthodoxes de relation
   entre p(A) et p(B), etc.  Ceci me mettrait plutôt en
   accord avec certaines suggestions concernant les
   modalités d'organisation d'un vrai débat, telles que les
   donne le texte/article.

2. Plus amusant et plus léger est le fait que Jean
   considère que le débat (dialoguea) devienne “plus
   politique" avec mon intervention. Ce que je prétends (et
   crois pouvoir...  soutenir dans le détail), c'est que
   /le texte d'envoi est politique de part en part/. Dans
   le noyau central de l'initiative aussi bien que dans
   l'acceptation acritique de données aussi clairement
   /politiques/ que :

   - mentionner la CNDP comme institution impartiale : qui peut le croire ?

   - Citer les positions de Chantal Jouanno sur le débat :
     qui est-elle ? d'où sort-elle ? comment a-t-elle accédé
     à ce poste ? Est-ce un “mérite" ou un pantouflage aussi
     indécent que tant d'autres ?

   - On admet que les “garants" sont des (vrais) garants :
     qui les choisit ? qui les nomme ? quels sont les
     critères et quelle garanties nous offre-t-on de leur
     impartialité ? De même pour l'utilisation (envoi) de
     “ses commissaires" par Chantal J. Mais de quel droit ces
     “commissaires" seraient-ils nommés arbitres dans un
     éventuel vrai débat où devraient être acceptés (et
     souhaités) ceux qui ne sont pas du même monde que ces
     technocrates membres éminents de la caste du pouvoir
     (droite, gauche et centre confondus) ?

3. L'initiative de dialoguea est lancée dans un contexte
   extrêmement intéressant : un soulèvement populaire qui
   jette sur la table la volonté de /partage du pouvoir/
   (qui est donc au centre de tout cela). L'initiative
   dialoguea paraît surgir comme une “offre de services" :
   Mesdames et Messieurs du pouvoir, (puisque c'est vous
   qui avez le fric), pour le bien de tous, nous,
   spécialistes du numérique, vous proposons de construire
   des outils.

   Je suggérerais de déplacer les cibles de cette offre de
   services, des technocrates et des politiciens, vers “les
   gens", vers les /lieux de contre-pouvoirs/ bien fragiles
   et qui pourraient sans aucun doute profiter d'outils
   bien conçus pour renforcer leur pouvoir face à la
   capture du pouvoir institutionnel par la caste
   techno-politique.  Bien sur, un débat bien encadré par
   des règles bien conçues pourrait devenir un /outil
   général/, sauf que le fait d'avoir comme perspective la
   technostructure et ses besoins, crée des distorsions
   irrémédiables (peut devenir un nouvel instrument
   d'oppression), et le fait devenir non pas un instrument
   général, mais un cas particulier au service des
   relations de pouvoir (que l'on choisirait d'ignorer).

   - [2019-03-26 mar. 15:01] Très bien encore,
     et évidemment,
     en ce qui me concerne,
     c'est un propos qui remet l'accent sur la nécessité
     que tout un chacun, raisonnablement muni d'un accès à un ordinateur,
     puisse tenir à jour une archive
     qu'il compare à l'archive publique.


Comment un “outil numérique quelconque", peut-il
être... quelconque ? Il faut bien admettre qu'on part
toujours du concret et que la montée en généralité,
suit (quand elle suit).  On n'aboutit pas au même
résultat selon qu'on se rapproche des assemblées de
base des Gilets jaunes (pas un mot là-dessus, bien que
tout pointe vers la crise qu'ils ont révélée et
élargie), ou autres pas jaunes, et prendre en compte
les modalités réelles (à constater et identifier sur le
terrain) de construction des discours, et du débat
existant, ainsi que des modalités de résolution des
contradictions, des oppositions d'intérêts, etc.  Et
formaliser à partir de ces matériaux, identifier des
nœuds de blocage récurrents, proposer des moyens de les
dépasser, etc. en fonction des besoins de ces groupes
de personnes, notamment sur le terrain des discours
publics. Et possiblement, arriver progressivement à des
généralisations.


Nous sommes dans une crise de confiance vis à vis de la politique
et lorsque la confiance dans la politique est basse,
la démocratie et les institutions démocratiques échouent.
Alors que proposer pour rétablir la confiance à la suite
de programme et d'institutions en échec ?

[fn:gouvernance] « La gouvernance fit son entrée en 2004 dans la Lingua Quintae Respublicae
en prenant des parts de marché à gouvernement (trop étatique), à direction (trop disciplinaire),
à management (trop technocratique, bien qu'assez ancien dans la novlangue). Les américains
l'utilisent principalement dans corporate governance, c'est à dire la direction
des entreprises par leur actionnaire Hazan06.
** Le dialogue
« Faire dialoguer les disciplines via l’indexation des connaissances »
est l'intitulé d'un appel à communication pour un colloque indexation-Numerev-MSH-19.
Mais ce titre et une partie du texte de présentation qui l'accompagne sont fautifs.

Les disciplines ne dialoguent pas, elles se
pratiquent et ce sont leurs pratiquants qui dialoguent.
On ne peut pas non plus indexer « les connaissances » :
on peut indexer des textes, des ouvrages, et dans le contexte
présent il est bien entendu que c'est d'indexation automatique
de données numériques dont il s'agit.

Une citation est mise en exergue dans l'invitation :
#+latex: \begin{quoting}
« Une erreur par rapport à un système de références peut
devenir une vérité dans un autre type de système.  La notion
d’information, issue de la pratique sociale, a pris un sens
scientifique précis, nouveau, dans la théorie de Shannon,
puis elle a migré dans la biologie pour s’inscrire dans le
gène ; là elle s’est associée à la notion de code, issue du
langage juridique, qui s’est biologisée dans la notion de
code génétique. La biologie moléculaire oublie souvent que
sans ces notions de patrimoine, code, information, message,
d'origine anthropo-sociomorphe, l’organisation vivante
serait inintelligible. » Morin94.
#+latex: \end{quoting}

L'idée selon laquelle une chose était vraie selon
un certain référentiel rationnel et fausse selon
un autre est une souche de raisonnements problématiques.

« Référentiel de rationalité ».
Le concept était évoqué avec
les espoirs d'un débat
entre scientifiques et théologiens.
L'instigateur défendait que la
théologie est une science
avec des prémisses et des axiomes
que “l'orthodoxie scientifique” ne peut vérifier.
Ce que, implicitement, il exprime, est l'idée
qu'il existe un référentiel absolu, ce qui est absurde, tout
référentiel étant par essence relatif.
Par un habile tour de passe-passe,
notre Gordius convoquait la notion
“d'intériorité réciproque” pour défendre
que « la raison n'exclue pas l'irrationnel »
et que les intuitions des mathématiciens
sont censées le démontrer.
Sa nouvelle entreprise :
« formaliser la rationalité d’une idéosphère c’est à dire ce
qui concerne toute l’activité raisonnée menée par des êtres
cognitifs. Cette question concerne la logique et la
réflexivité de cette activité puisque l’être cognitif est
capable d’introspection. »

Dès lors égarés dans le monde du rêve,
on ne savait plus très bien
où situer ensuite la dispute.

Si l'eucharistie peut être perçue comme une nourriture
spirituelle ; Il faut aussi rappeler Boucheron16
l'opiniâtre présence des figures d'autorité,
de l'église ou de l'État, qui tels
des pères hyper-dominateurs tentaient
de définir le cadre mental
dans lequel d'autres seraient autorisés à penser.

Revenons sur la citation de Morin.
Un tracé historique résumé au schéma
ne peut expliquer comment
une idée
voyage
à travers un siècle tel un jet de pierre.
Ici encore, l'objet est abandonné de tout sujet.

Le colloque en lui-même ne révèle
pas la moindre aspérité de communication entre les personnes,
ni le moindre débat, ni le début d'une controverse :
il s'agit de remplir un exercice scolaire.
Le mythe de Babel nous dit, au fond, que les gens ne se
comprennent pas et qu'il ne peut y avoir de traducteur
universel.
Dans « the chinese room » de John R. Searle Searle88 (et parue sur
comp.sci.ai) personne ne comprend le chinois dans
l'histoire et la chambre n'existe pas.
Dégager du sens d'une réalité qui au point d'aboutissement est formel,
c'est l'application de deux objets qui ne sont pas apparentés.

L'interopérabilité, c'est l'utilisation d'un même code, c'est partager
quel\-que chose culturellement et nidifier le contexte dans lequel ce code va
pouvoir émerger.  C'est la question de la traduction ou de la traduction d'un
message sortant du registre de l'interopérabilité, pour retourner dans celui
des machine en échangeant des codes.  Les échanger, soit. Mais c'est surtout
de les comprendre et de les interpréter dont il s'agit. Entre les personnes
bien sûr, et d'un langage différent.

Du sens en règle générale, nous pouvons produire des suites
de caractères et des mots et les transmettre.
À l'inverse de ce que fait la machine, qui, des suites de caractères
assemble des mots qui auront du sens et pour ces concepteurs,
et pour la suite des opérations.
D'un livre à un autre passent des messages,
mais ça n'est pas à proprement parler de la communication.


Prenant la citation de Morin pour du bon pain, nos
organisateurs, au lieu de s'interrompre sur le sens des
notions convoquées — qui voyagent tel des papiers aux vents,
dans des directions erratiques — ont prolongé cette
réflexion, pourtant chargée de généralités et
d'essentialisme, qui produit une confusion dans laquelle
l'humain ne trouve décidément plus sa place : le règne de
l'objectivité scientifique ayant supprimé et l'observateur,
et l'invité et le critique.

Encourager le consensus ou la controverse n'est pas une activité en soi,
mais les échanges de savoirs font parti du travail des chercheurs et
ils doivent se donner la capacité de le faire hors des murs.


Nos duellistes du XVIIè en lavant les affronts avec les
honneurs jetaient aussi la vérité avec quelques pelletées de
terre au fond d'un trou. Bien que tolérés, leur
interdiction grandit à partir de Louis XIII.
L'histoire a retenu nombres de rivalités et d'assassinats
politiques qui se passèrent ainsi.
Mais renoncer à la vérité signifie aussi la fin de
toute chose et pas seulement pour le philosophe car enfin
s'il était possible d'y renoncer, il n'y aurait, en chemin,
plus qu'égarement, mensonge, faux-semblant, une place
réduite pour la raison et le début de l'absurde.
Alors oui, en lieu et
place du bon sens de raisonner,
on peux toujours dire
“je préfère ne pas savoir”,
et
avant
d'être un
renoncement
de faire valoir son choix.
** Realteknopolitic

Le soutien technologique apporté par l'armée se constitue sur les crises.
Celui des entreprises sur le profit. La combinaison des deux vise
à produire les déséquilibres entre guerre et reconstruction,
innovation et capitalisation. La maîtrise d'une domination sur une
très grande population occidentale exploite ses moyens
technologiques pour fabriquer une propagande adaptée,
rester très informée et
connaître la nature des échanges entre de potentiels opposants :
le pouvoir acquis est proportionnel
aux quantités d'informations disponibles et aux capacités
de les assimiler et de les exploiter.

La justice ne s'applique
qu'en connaissance des causes. C'est la présomption d'innocence qui
prévaut. Le contraire de la justice n'est donc pas une injustice,
mais le manque d'information à son sujet. L'injustice survient dès
lors qu'existent de fausses ou de mauvaises informations.

Dans une technocratie post-moderne l'aspiration
technologique d'un peu\-ple grandit pour trouver matière à
ré-enchanter son imaginaire.
La finance profite de cet élan de consommations,
de l'information détaillée qu'il est possible d'obtenir
et de la compétition qu'elle engendre.
Le rapide renversement
des relations induites — existent des empires digitaux
tandis que chacun peut être son propre media — établit une
situation dans lequel le terrain de mésentente des
partis politiques ne se délimite qu'au terme d'une
radicalisation des conflits.


L'industrie informatique a suivi schématiquement le modèle
d'arrivée du tracteur dans l'industrie agro-alimentaire :
le progrès industriel provoqué par une crise mondiale accélère
la production des chars, qui seront exploités ensuite par
l'industrie agro-alimentaire. La Silicon Valley est ainsi le
fruit de la guerre électronique, du développement des radars et
des contre-mesures (ELINT et SIGINT). En 1968, 35% des fonds de
recherche en électronique sont pour des travaux classifiés. 50%
du travail du SRI (Stanford Research Institute) vient du DoD ;
ce qui entraînera d'ailleurs de nombreuses manifestations étudiantes.

Les moyens de protection de l'information personnelle sont
extrêmement faible face aux capacités de pompage de données
de la NSA ; et accompagnée par la guerre déclarée au
terrorisme ceci va avoir la même conséquence : le renforcement
des sécurités intérieures et de moyens de contrôle social.
Ce qui devient une fin politique en soit et va justifier
l'emploi systématique des mesures d'exceptions.

Dans cette prolongation, il faut craindre les progrès de la
bio-informatique : si des diagnostics personnalisés
deviennent trop précis, cela produira en bout de chaîne un
gouvernement hostile qui ce sera doté de capacités et
de critères de filtrage extrêmement
précis.  Le rêve de tout bon totalitarisme.


Cette guerre de l'information comme un orage électronique,
fait rage sur les systèmes informatiques du monde entier.
Par son caractère inédit et invisible, il est l'objet de
quelques littératures abondantes et spécialisées, qui s'empilent
chaque matin dans les secrétariats des agences de sécurité.
Ce même caractère invisible et ubique le rend difficile et
complexe à appréhender.  Complexité juridique et technique,
complexité informatique et algorithmique, l'entrée
fracassantes de ces disciplines à la fin du XXème siècle a
complètement renouvelé les champs et les possibles des
mathématiques, de la logique et donc de la pensée.  C'est en
dépit des apparences et de cette paire de “google” que l'on
nous a posé devant le nez que la complexité des systèmes a
pris des proportions anormales.

Je n'entre pas dans des considérations techniques, car
je voudrais rester sur le fait social : dans les recoins de
ces fondations historiques se sont larvés les premiers
cocons d'une insectisation de l'espèce humaine.
Sa capacité de suivre à la trace des signaux
faibles et de les propager à toute une ruche.
La sophistication des systèmes est une boucle rétroactive.
Elle est aussi synonyme de fragilité.  On espérait
l'augmentation de l'intellect humain par la nature diffuse
des vecteurs de pensées, mais l'hypermediatisation
a produit des classes encore plus marquées
qu'elle ne l'étaient avant.

Tandis que chaque individu est unique, un autre caractère de nature
insectoïde apparaît, lié à la reproduction à l'identique de traits que
l'on va retrouver chez les individus : ici une partie de leur appareil
de communication, revendiqué comme tel, des extensions de soit,
des circuits imprimés, le
tout transitant par des émissions radios ou des signaux électriques
aussi invisibles que les phéromones. Un cliquetis prophétique
nous rappelle aussi à cette image Hart98.

On peut associer cela à un phénomène de normalisation
provoqué par l'establishment dominant, mais une thèse
biologique semble aussi improbable qu'une théorie économique
et sociale. En cherchant bien, une hypothèse de l'hybride,
du double prothétique ou de la préservation de l'espèce
serait à l'horizon.
Y a-t-il quoi que ce soit pour étayer ce discours, ou bien est-ce la théorie sociale qui prévaut ?

L'abolition des distances et la capacité de rebond de messages qui
font le tour de la terre en quelques centièmes -- si ce ne sont des
millièmes -- de secondes ouvre sans forcer le potentiel de la
dimension mondiale des conflits.

Il ne s'agit là ni de bataille rangées, ni
d'une guerre de drones ;
la civilisation de la lutte
Debray14
— au sens où elle est
ordonnée, polie, civilisée, longtemps
espérée par l'Europe, est arrivée, dans l'Europe des
républiques et des banques corporatistes.
Les rapports de forces brutes désormais
trop déséquilibrés, une guerre, une vraie, aussi inhumaine -- c'est à
dire profondément humaine -- soit-elle n'est plus proclamées en
réponse à l'invasion de son voisin ni a titre préventif, mais en
raison du jeu systémique complexe de la préservation.

Les progrès considérables dans le domaine des microprocesseurs sont
issus de l'alternance entre les besoins technologiques militaires et
le secteur privé entreprenarial, pour la simple raison que, ainsi que
Vinton Cerf l'a souligné, les capacité d'investissement du
secteur privé dépasse largement celle de n'importe quel gouvernement.

Dans le prolongement du corporatisme fédéral, la guerre de
l'information fait tâche d'huile et se dilue sobrement
dans le soft power.
La sphère corporatiste s'agrandit avec les extérnalisations, les
délocalisations et la sous-traitance des services.

La frappe terroriste est
frappe de guerre. Et une attaque
informatique, qui peut sembler un phénomène isolé voire
aléatoire, peut aussi être ciblée et précise, tout en restant noyée
dans le bruit électronique. Hors tout oppose un
attentat suicide à un bombardement par drône ou à un
trafic d'informations.
La situation est diamétralement aux deux opposés d'un spectre, la
doctrine religieuse contre une propagande de jeux
vidéos, l'engagement total et physique d'un kamikaze
contre le pilote d'un drône qui largue une bombe et rentre
dîner le soir avec sa famille.

Le risque d'envenimement et de contamination des conflits n'est pas à
chercher bien loin : les ressources énergétiques fossiles sont au
cœur d'un problème qu'il est urgent de démanteler. Après la société
du moteur à explosion, la prolifération des plastiques et des métaux
rares est le deuxième barrage qui place la société de l'information en
confrontation à elle-même. Comment en est-on arrivé là ? Et bien,
que justifie la provocation d'une crise : la recherche
d'une stabilité future prospère.
Il n'y a pas de guerre sans paix, mais le contraire, qu'il n'y a
pas de paix sans guerre n'est pas vrai et on doit défendre que
la paix n'est pas l'absence de guerre.

Préoccupations autour du réchauffement climatiques mises à part,
c'est aussi la marque pesante qu'un pouvoir grandissant et invisible
s'empare de nos réseaux de communications, de nos écrits et de nos mots.
Et c'est un réflexe quasi organique qu'y s'y oppose.
** Collaborer pour le climat

Le point de départ est l'écologie.
Une idéologie qui rentre en opposition avec le capitalisme
et qui entend agrandir le domaine de la politique
sur un terrain réaliste, à même d'exercer une
pression sur le thème sacré de l'union nationale.
Le principe est pourtant simple : se serrer les coudes et ne pas se disputer.


Fruit de travaux universitaire sur l'intelligence
collective, le planning collaboratif et le changement
climatique, the climate colab
ClimateColab11,Toplak10,WDSmith n'offre pas un objet
technologique inédit, mais plusieurs réflexions combinées entre
elles et un problème centré sur un sujet : trouver les
doublons. Il se présente comme un forum favorable à la
synergie des idées : quand les utilisateurs partagent leur
création dans un forum commun, ceci peut activer une
explosion synergique de créativité. Les gens
développent de nouvelles idées en recombinant et en amplifiant
celles qui ont été déjà émises par d'autres.
Les systèmes sociaux-numériques ouvrent l'accès à de grandes
diversités d'expressions, des voix qui autrement
ne seraient pas entendues, et peuvent, désormais, avoir un impact
significatif.

C'est l'effort social regroupé qui produit des résultats
remarquables du simple fait que de nombreux scrutateurs
lisent et relisent continuellement des textes en partages
et apportent des corrections et des amendements.
C'est le principe du logiciel libre.
Et c'est ainsi, que motivés
et
informés,
de grands  groupes de contributeurs
indépendants
peuvent collectivement produire et obtenir de
meilleurs jugements qu'un petit groupe d'experts. Un
jugement collectif annule des biais et des lacunes portés
individuellement. C'est la sagesse du peuple.

Les technologies de réseaux sociaux-médiatiques produisent
souvent, cependant, « plus de chaleur que de lumière » quand
elles sont appliquées à des questions difficiles et controversées.

Du contenu désorganisé les médias sociaux existants en
produisent beaucoup et retrouver ce qui a été écrit dans
un sujet d'intérêt prend du temps.  Ceci renforce la
couverture non-systématique de sujets, les utilisateurs ne
pouvant identifier quelle parties ne sont pas correctement
couvertes et nécessitent plus d'attentions. Cela tient
directement au mode de publication et d'édition, c'est à
dire un certain rapport à la diffusion et à la captation
de l'hypertexte et préalablement à leur système d'écriture.


Le ratio bruit/signal est faible : il est notoire que les
médias sociaux produisent du contenu hautement
redondant. C'est ainsi que des points importants sont
souvent noyés dans la masse, par de la quantité plus que
de la profondeur.  Les médias sociaux obtiennent souvent
beaucoup de petites contributions plutôt qu'un nombre
réduit d'idées plus profondes et bien considérées, puisque
le processus de raffinement collaboratif n'est pas
intrinsèquement porté et soutenu.

Polarisés, les usagers des systèmes de réseaux sociaux
s'assemblent en groupes qui partagent les mêmes opinions. Ils peuvent
ne percevoir qu'un sous-espace des idées et des arguments ou des
questionnements qui sont potentiellement pertinents pour résoudre un problème
donné.  Les gens tendent à prendre des version plus extrêmes, mais
pas mieux informées, des opinions qu'ils ont déjà.

L'argumentation est dysfonctionnelle car les médias sociaux existants
n'encouragent ou ne renforcent pas l'argumentation bien
fondée. L'action de poster est donc souvent basée sur la préférence
plus que la preuve ou la logique.
** L’argumentation
#+begin_quote
« C'est ça qui est à mon avis très riche d'enseignement dans
la façon dont les italiens, jusqu'à Machiavel, ont pensés
leur crise politique : ils la pensaient d'abord comme une
crise de la langue politique.  Et cela nous rappelle des
choses, car déjà en Mai 68, on avait, au fond, vécu — pas
moi mais en tout cas ceux qui l'ont vécu — la rapide usure
d'un lexique qui d'un coup ne désignait plus rien.

Et au fond cette idée machiavélienne que le mauvais
gouvernement arrive toujours au moment où on prend un mot
pour un autre et donc où le langage politique devient
inadéquat à saisir les choses.

Bien sûr que c'est ce qu'on vit. Évidemment qu'on est
désorienté et on est désorienté parce qu'on a proprement
plus de mots pour le dire. Alors à la hâte on va ramener ceux du passé, on va dire que
c'est le fascisme on va... mais c'est pas ça l'histoire.
Elle est beaucoup plus complexe et elle doit être plus lente
et plus patiente.
C'est pour ça que je dit que c'est aussi un éloge du calme. »
#+end_quote

#+begin_quote
Patrick Boucheron
professeur au Collège de France,
titulaire de la chaire « Histoire des pouvoirs
en Europe occidentale, XIII^{e} - XVI^e siècles ».
#+end_quote

-----

De nos jours la science est largement à même
de concurrencer efficacement la religion
puisqu'elle répond d'elle-même à ces deux
besoins strictement idéologiques que
sont l'espoir et la censure et qui constituaient
jadis la chasse gardée du religieux Zizek12.
Seule la science a le pouvoir de faire taire
les hérétiques. À l'heure actuelle, c'est la seule
institution capable d'affirmer son autorité.
Tout comme l'Église par la passé, elle a le pouvoir
de détruire, ou de marginaliser, les penseurs indépendants.
[...] Pour quiconque chérissant la liberté de pensée,
il s'agit peut-être d'une mauvaise nouvelle, mais
c'est sans conteste la raison principale de l'engouement
pour la science. Pour nous, la science est un refuge
contre les incertitudes, la promesses — et, dans
une certaine mesure, le vecteur — du miracle
consistant à se libérer de la pensée,
alors que l'Église est devenue le sanctuaire
du doute.

Il ne s'agit pas ici de la science en tant que telle.
L'idée selon laquelle la science permettrait
de se « libérer de la pensée » n'est donc pas
une reformulation de la fameuse phrase
de Heidegger : « La science ne pense pas. »
Il s'agit plutôt de la science en tant que force
sociale ou institution idéologique dont la fonction
consiste désormais à apporter des certitudes,
un point de référence stable, de l'espoir —
les progrès technologiques nous aiderons
à combattre la maladie, à prolonger notre existence, etc.
Dans cette dimension, la science incarne ce que
Lacan appelait le « discours universitaire » dans
sa forme la plus pure : un savoir dont la « vérité »
est un signifiant maître, autrement dit le pouvoir.

Aujourd'hui, science et religion ont échangé leurs places :
la première fournit la sécurité jadis garantie
par la seconde. En une étrange inversion, la religion
est devenue l'un des lieux à partir desquels il est possible
de déployer des doutes critiques sur notre société.
Elle est devenue un site de résistance.

L'hérétique en matière politique, religieuse, morale ou esthétique
est quelqu'un qui refuse d'aller contre sa conscience.

A partir de travaux sur l'argumentation Cerisy87,Plantin05,
des notes inscrites sur les copies dont je dispose,
et de celles prises par d'autres au cours du séminaire
organisé par le groupe AREN et qui convoqua l'auteur,
j'aborde un commentaire sur le sujet,
l'objet étant avec le résumé, de faire quelques mises
au point.

Le mot, sujet central, apparaît 441
fois dans les 163 pages d'une édition de 1996 Plantin1996c.
On dénombre 535 racines
“argumentati" (-f,-ve,-on, etc.) et 680 “argument”,
Il arrive fréquemment que l'étude didactique de l'argumentation
se confonde avec l'acte d'argumenter en lui-même, voire avec
les schèmes logiques, qui, mis bout à bout en composent une
(d'argumentation), ce qui ne facilite pas la lecture.
L'auteur effectue cette distinction :
« Deux approches de l’argumentation cohabitent : l’une liée
à l’étude de la langue et du discours discursif [...] qui
établit de longues listes de formes argumentatives [...].
L’autre modélise des schémas logiques [...] dans une
écriture de logique mathématique. »
C'est dans la deuxième approche, que les arguments
sont pré-supposés véhiculant des preuves.

La même distinction s'opère dans la philosophie qui
désigne
un art ou une discipline
ou un système de pensée
détaillé, rigoureux, méthodique, éthique, moral, ithos,
où il s'agit d'intégrer et d'expérimenter des notions.

L'édition de 2005 qui dans sa première moitié est
principalement une étude bibliographique, se découpe en sept
chapitres, qui font l'objet d'une dizaine de sections chacunes
dont la première rappelle l'existence de l'approche
classique, la Rhétorique d’Aristote.
L'histoire de la discipline
nous dit en (très) résumé que c'est
l'art de penser correctement,
celui de bien parler,
et celui de dialoguer, διαλεκτική (τέχνη).

Sont donc convoquées trois vertus théologales :
penser bien, bien parler et agir en accord, sachant
que le « correct » en tant que la conformité à des règles,
tout en étant dans des normes sociales,
peut aller se situer en deça du bien.

Aristote, en distinguant trois types d'auditeurs,
distinguait ainsi trois genres rhétoriques, chacun trouvant
à s'adapter à l'auditeur avec un certain type
d'effet social : les discours délibératif (ou politique),
judiciaire, épidictique (ou démonstratif).  Emprunté au
latin epidicticus (qui sert à montrer),
— lui même emprunté au grec ἀποδεικτικόςn,
évident —
démonstratif
ne prend
pas le sens de démonstration logique, mais celui d'une
manifestation démonstrative (pour une cérémonie, tel qu'un
évènement religieux).  Et puisqu'on a indiqué un type
d'effet social et que les trois éléments cités au dessus
sont les trois genres rhétoriques, précisons que le
délibératif s'adresse au politique et son objectif est de
pousser à la décision et à l'action (et a pour fin le bien);
le judiciaire s'adresse au juge et vise l'accusation ou la
défense ; le démonstratif fait l'éloge ou le blâme d'une
personne (a pour fin le beau, en terme actuel : la valeur).

L'image qui vient aux esprits est celle des citoyens de
l’agora grecque, et aux tribuns de l’empire Romain qui
parlent debouts devant une assemblée des affaires de la vie
publique. Or c'est toujours le cas, étant la manière la plus
saine et la plus sûre de discourir et de manière
ordonnée... tant que ces lieux existent.

[note en marge :]
“Puis la rhétorique se met au service de l’église.  Elle est la base même d’éducation des jésuites.”

La rhétorique est un instrument du discours, qui, en tant
que tel, ne peut se mettre au service de.  Dire que la
pensée ou le dialogue se mettent “au service de" est dans
le même registre d'expressions faussées.  De manière générale
ces formes passives sont suspectes. Que l'église
instrumentalise la rhétorique et en use est plus à même de
restranscrire une histoire.  Comme il y a un tronc commun
dans cette éducation, les jésuites reçoivent une éducation
commune et les jésuites sont éduqués selon des valeurs
aristotéliciennes.

#+latex: \begin{itshape}
« En 1879 [...] Le pape Léon XIII
publie l'encyclique Aeterni Patris, qui établit Thomas
d'Aquin (1227-1274) comme une sorte de philosophe officiel
de l'église catholigue. Or cette philosophie « Le
néo-thomisme » adhère à une vision de la logique artistotéliecienne
comme fondement de la pensée au moment précis ou cette orientation
est scientifiquement dépassée. »
p.12.
#+latex: \end{itshape}

Mais par qui et comment, il faudra le chercher ailleurs dans le labyrinthe...

[Chapitre VII p.106 : le cas des ouvrages fondant l'argumentation sur la]
« persuasion-séduction intellectuelle en vue d’une
adhésion, créée ou renforcée, à de nouvelles
visions du monde : c’est définir l’argumentation
par sa finalité, qui n’est autre que la conversion
et la fortification des croyances, et il n’y a pas
loin de la croyance à la foi. »

Une vision athéiste plutôt que
théiste. Mais quelle est la hauteur du gouffre entre la
croyance et la foi ?

L'argumentation chez les Jésuites,
analysée par Pascal et non sans ironie
dans ses Provinciales Valencin55, porte d'abord sur
la question de l'orthodoxie et du texte et sur la
nature des accords selon les professions. C'est autour
de la religion du livre que se structure le débat
théologique dans les limites arbitrée par Pascal
en montrant les accords, les désaccords et les mésententes qu'il
peut y avoir sur le sens et sur la forme.

Cette explication basée sur le prosélytisme est
suspecte, d'autant plus qu'elle fait référence à un
temps où tout le monde ou presque croît, depuis les
grecs et avant.  Sinon de quoi parle-t-on ? De la
conversion de qui et de quoi ? Des païens ?

Un argumentaire chrétien se bâti sur une éducation
théologique, cette éducation faisant l'objet de
questionnement qui animent le débat religieux.  Argumenter
en dehors de l'église en vue d'une conversion n'a donc guère
de sens : “Puisque je te dis que Dieu existe !”.

Daniel L. Everett
était d'abord missionnaire et il tenta de
convaincre les Pirahã de l'existence d'un individu, le
Christ, qui lorsqu'ils lui demandaient s'il
l'avait vu, n'existait plus que dans un ouvrage, la Bible.  Or
leur culture et leur langage ne les amènent à ne porter de
l'intérêt à des évènements rapportés que s'ils ont été
directement vécus où dont le témoin peut être rapporté. C'est
l'échec de cette rhétorique et la réalisation que eux
vivaient déjà en un paradis qui lui firent abandonner sa
mission.

Une éthique du discernement n'oppose pas croyants et
incroyants. Car l'éthique du discernement s'exerce au sein
même des religions du livre (exégèse canonique, Talmud,
Tafsir).
En lieu et place de finalité, c'est l'immanence du débat
religieux qu'il faut agiter, là pour des raisons morales et
philosophiques, plus que pour des objectifs politiques
atteints par la mystification.

Il y a des croyances
et il y a des arguments contradictoires,
et s'il on tient à définir la “finalité"
de ces derniers, il n'ont qu'un but :
faire avancer le débat et les connaissances,
quand bien même ils portent sur l'interprétation
à donner à une tradition.

David Graeber avait un argument massue que je résume ainsi :
prenons une argumentation finale qui ne soit
pas de la communication : la violence, c'est
aussi très “opérant” au sein des
débats, et avec des résultats très
prédictifs : tapez suffisamment fort sur la
tête et tout ceci devient hors de propos.
Et cela nous aidera à rappeler ce
qu'ont aussi été la croix et le fer.

Après la commission Buisson-Briand et la séparation
de l'Église et de l'État, cessa la rhétorique enseignée
en latin dans les universités laïques.
À quel niveau se déplaçait alors le choix d'opposer un
degré suffisant de difficulté pour réserver les savoirs
à un cercle restreint est une autre question à réserver
pour un historien.


Les études sur l'argumentation ont connues un
développement remarquable dans les années suivants la
seconde guerre mondiale. On peut trouver de multiples
explications à cela : l'opposition aux phénomènes
de propagandes, la construction
d'un mode de discours démocratique rationnel,
le rejet des discours totalitaires, les progrès de la logique
et des médias.


Le sujet est transversal à la logique et aux mathématiques
et, plus que cela, lié aux sciences de la
communication, puis à la communication de masse.
« la logique n’est plus un art de penser, mais un art de calculer. »
écrivait Frege, en 1879.
Sa contribution à la logique formelle est
considérable, Russel le reconnaît, puis lui
révèle sa propre contradiction en logique,
mais c'est à Leibniz, un siècle auparavant,
qu'il faut attribuer la paternité de ceci.

Chez Quintilien, dans le registre rhétorique, et parlant de preuves,
« artificiel » revêt le sens de « fait avec art, fait selon l'art »,
qu'il faut comprendre par
« imaginées par celui qui parle, c'est-à-dire basées sur la déduction ».


Dans le passage « D’une logique naturelle à l’intelligence
artificielle » Plantin05 (I.III.3, p.16) le propos
devient elliptique et renvoie à des références pour
comprendre des modalités formelles que l'on peut prendre la
peine d'expliquer.

L'inconnaissable (le mystère) représente une liberté
exactement pour sa souveraineté face au déterminisme ontologique.
Croire naïvement en des taxonomies
représentant une réalité hiérarchiquement structurée
ouvre la voie à des mythopoïèse sémantiques.
Mystère à opposer à l'énigme, le mystère n'apportant
pas de réponse.
Les I.A. passent par cette étape, produisent
des quantités d'aberrations avant de « minimiser
l'erreur », c'est à dire obtenir des classifieurs,
qui au vu des résultats qu'ils produisent
sont jugés satisfaisants statistiquement.

C'est la question de l'intelligence artificielle des
hommes qu'il faudrait poser.  Amplifiée et manifestée par la
quantité déjà disponible de raisonnements formels écrits,
prouvés, programmés qu'il est possible de s'attribuer et qui
agitent des fantasmes et projettent des chimères.

Ça n'est pas la logique en elle-même qui produit des suites
d'inférences, ce sont les cerveaux des mathématiciens. Bien
sûr que la calculette “calcule" mais il faut bien, d'abord,
calculer la calculette.  Et la calculette ne fait que ça :
calculer.  Et elle aura beau stocker le calcul, ça n'est
pas pour autant qu'une quelconque “connaissance” y soit
mémorisée.


« Non seulement les mots ne permettent
pas la démonstration, mais ils permettent aussi
peu cette forme dégradée de la démonstration que
serait l’argumentation. Celle-ci n’est qu’un rêve
de discours et notre théorie devrait plutôt
s’appeler Théorie de la non-argumentation. »
Cette citation est de Ducrot, un puriste de la démonstration.
L'insulte suprême des mauvais profs de maths est
« mais ils ne savent même pas faire une démonstration ! »
Parce qu'on le leur mal expliqué.


« Les arts de la preuve, argumentation et démonstration,
partagent les caractères suivants : une interrogation, un
langage, une inférence, dérivation logique (P donc P). »

Ce que, tout en tournant autour, Plantin ne dit pas, c'est
que la première caractéristique distincte de la preuve est
que l'on peut la montrer, on peut s'y référer, on peut lui
attribuer une provenance et une origine.  L'idée qu'il
y aurait des caractéristiques communes à trouver dans
l'exercice de la pensée rationnelle, que ce soit dans des
arts séculaires ou au cours d'une enquête m'apparaît comme
une tentative pour isoler des concepts au lieu de les articuler.

On trouvera plusieurs passages qui exposent un propos relativement
ardu pour entendre dire des choses
simples : un paragraphe entier est nécessaire pour parvenir à
exprimer qu'une chose peut être tenu pour vraie, tandis qu'une
autre ne peut l'être en premier lieu et se doit d'être déduite.
Ailleurs
le terme inférence est utilisé pour désigner des
observations
(“Les pratiques argumentatives permettent des inférences
sur les caractères [des personnes]”).
Inférence est le terme le plus général, dont
raisonnement, déduction et induction,
sont des cas spéciaux.
Ce qui fait défaut est la fragilité du lien conducteur
pour sinuer entre ces agrégats de concepts,
censés permettre de créer un discours cohérent,
le risque étant de voir apparaître des absurdités.
Et c'est ainsi que l'empathie est signalée comme un risque
(pour l'argumentateur logique bien sûr),
dans la section sur éthique et pathos ;
C'est θικά (qui concerne la morale) et πάθος (ce qu'on ressent).
On peut voir que le rapprochement étymologique
est bien plus tardif, par dérivation de patheticus.


Pour finir, dans le registre du débat théologique
sont évoquées
« dix sources de légitimité d’un argument dans l’ordre d’importance .»
En fait de sources, il s'agit « d'autorités »
étant entendu que les autorités suprêmes sont spirituelles.

« Dans un ouvrage récent d’apologie militante, [il]
est rapporté que le “premier sujet de désaccord
entre les compagnons fut la réalité de la mort
même du prophète. Ainsi le très estimé Omar
persistait à dire que le prophète n’était pas
mort [...]”. Un autre compagnon lui rappela alors le
verset du Coran (39, 30) : “Tu dois mourrir un
jour, comme ils le doivent aussi.” L’épée tomba
aussitôt des mains d’Omar qui se jeta à terre
convaincu que le Prophète avait cessé de vivre. Si
l’on en croit cette anecdote, le meilleur argument
capable d’emporter la conviction totale, n’est pas
un fait, mais le Texte. Les mots peuvent parler
plus haut que les faits. »


La vieille querelle entre sunnites et chiites
est à rapprocher des diverses formes de protestantisme.
Ce qui nous ramène aux remarques qui ont précédées à propos des jésuites.

Mais
la traduction exacte de la sourate est
« En vérité tu mourras et ils mourront eux aussi ; »
et non pas « tu dois mourir un jour, comme ils le doivent aussi »
ce qui dit significativement autre chose et plus encore avec cette épée tenue
puis lâchée. Les traditions musulmanes ont souvent évoquée
la prodigieuse longévité du prophète.
Il s'agit tant d'un rappel à la mortalité et à la santé
qu'une dénégation de la résurrection du Christ.

La dernière phrase de ce paragraphe (si on en croît
l'anecdote...) montre assez bien la confusion et le doute
qui guette entre l'argument, avancé, prouvé ou pas, les
faits, la conviction et loi religieuse.  Tout est assez bien
réuni dans ce bouillon, ce qui peut arriver quand on tourne
longtemps autour d'un texte en voulant expliquer quelque
chose que l'on a soit même pas bien compris.

Ce que l'on peut en dire est assez convenu : en dernier
recours, ce qui fait foi et autorité, c'est ce qui est écrit
dans les Textes.  Encore faut-il savoir interpréter ce qui
est dit. Et nous voici retourné au point de départ : à
l'orthodoxie.


L'intérêt que présente un argumentaire troué
ou une polémique
est d'offrir de nombreuses prises, contradictoires,
pour amorcer un discours. L'injustice — tout particulièrement
celle que l'on rendrait à un texte ou à quelqu'un
demeure une source de diatribes.


Servant la réplique (Dialogues76) à Paul Robert, qui se questionnait
sur le choix de ses exemples dans ses dictionnaires, « un dictionnaire
sans exemple est un squelette, disait-il », Bernard Potier, linguiste,
poursuivait :
« Et qu'est que c'est qu'un bon exemple ?
Là on retombe dans le choix, dans l'intuition du rédacteur :
il n'y a aucun moyen de sélectionner vraiment une citation
objectivement, d'ailleurs ça n'a pas de sens.

D'ailleurs tout ce qui est linguistique en fin de compte est
intuitif.  On essaie de se rattraper à travers des méthodes
qui ont l'air un peu plus élaborées, un peu plus
formalisées, à travers des techniques plus raffinées, mais
au fond, l'homme qui est train de rédiger est vraiment le
responsable de ses choix. »

Une commentatrice trouvait que
l'ouvrage « était tendu vers
la rationalité logique opposé à la conflictualité
et aux besoins et nécessité de convaincre » ;
conflit, convaincre,
qui, dans leurs formes les plus dures,
outrepassent logique et rationalité.
N'est ce pas le mal du siècle ?
On a troqué le nazisme contre
la rationalité, l'optimum,
chaque chose, chaque geste,
rendu comptable, chiffrable,
ce que Craipeau et Metzger appellent
la “gestionnarisation” et qui, véritablement,
transforme des personnes en contrôleurs
dont le rôle est de prescrire le travail
mais sans en connaître
la teneur, il faut juste que “ça marche”.
C'est aussi tout le propos du
"loup dans la bergerie" — sous entendue, socialiste
— de J.C. Michéa Michéa17,Michéa18, traitant de la contractualisation
de toutes choses confondues en un unique marché.


Quelques remarques dans les notes griffonnées dans
ma copie de Plantin05
mentionnent qu'il n'y a
« rien sur la
conciliation, la négociation, la diplomatie, [la]
résolution de conflit, ni sur l’intelligence collective, la
coopération, la création de dynamiques collectives. »

Ce sont là d'autres thèmes que ce petit
opsucule traitant un sujet spécialisé et
recherchant du formalisme en tout lieu ne peut
entendre aborder mais qui peuvent généreusement
faire le titre d'un autre livre.
Pour ce qui touche aux relations civilisées entre les États, on
peut s'attendre à ce qu'un traité de diplomatie
soit d'une autre envergure.
Dans le prolongement sur ces questions, on pourrait tout aussi
bien se questionner sur le
rôle paternaliste
que joue l'État
pensant que les citoyens ne sont pas rationnels ou
constater que, comparativement aux intellectuels politiques,
les hommes d'affaires politiciens
se sont arrogés trop de droits.

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** Bibliographie

#+print_bibliography:

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#+latex: \begin{flushleft}

* Bibliography
** Héran, François - Pour en finir avec « sociétal »
  :PROPERTIES:...

** Moatti A. - Le numérique, adjectif substantivé
  :PROPERTIES:...

** Frédéric Martel - {Soft Power, Bruno Latour sa pensée et son influence}
  :PROPERTIES:...

** Laurent Bloch - Chercheurs et ingénieurs en informatique, Nécessaire (mais difficile) alliance
  :PROPERTIES:...

** Hélène Gosselin - Un logiciel pour aiguiser l'argumentation des élèves
  :PROPERTIES:...

** Vincent Douzal and Nicolas Bercher and David du Colombier - From natural hazards to outer space and to {Plan~9}
  :PROPERTIES:...

** Jerome H. Saltzer, M. Frans Kaashoek - Principles of Computer System Design
  :PROPERTIES:...

** Laurence Lessig - Code is law : on liberty in cyberspace
  :PROPERTIES:...

** C J Silverio - The economics of package management
  :PROPERTIES:...

** Pike, Rob - Systems software research is irrelevant
  :PROPERTIES:...

** Iliya Grigorik - High Performance Networking in Chrome
  :PROPERTIES:...

** James Sinclair - The Algebraic Structure of Functions, illustrated using React components
  :PROPERTIES:...

**  Barrett, Edward -  The Society of Text: Hypertext
  :PROPERTIES:...

** Vannevar Bush - As we may think
  :PROPERTIES:...

** Richard Boudes - Un outil pour favoriser le débat en ligne des eleves
  :PROPERTIES:...

** Christian Retoré - {“L}a langue commune au cœur du raisonnement, notamment mathématique{”}
  :PROPERTIES:...

** Gabriel Pallarès - Développer les compétences argumentatives de lycéens
      par des débats numériques sur des Questions Socio-Scientifiques.
      Vers une didactique de l’argumentation et de l’esprit critique
  :PROPERTIES:...

** De Checchi, Kevin - L'apprentissage de l'argumentation et le développement de
              l'esprit critique : apports de l'épistémologie personnelle et
              des activités réflexives
  :PROPERTIES:...

**  Charlotte Olmsted Kursh -  The benefits of poor communication
  :PROPERTIES:...

**  Bloch, Laurent -  Systèmes d'information, obstacles \& succès :
    la pensée aux prises avec l'informatique
  :PROPERTIES:...

**  David Graeber -  Of flying cars and the declining rate of profit
  :PROPERTIES:...

** Mathieu Lafourcade - The JeuxDeMots Project is 10 Years Old: What We have Learned
  :PROPERTIES:...

** Françoise Waquet - Séminaire de muséologie – Les controverses au cœur de tous les savoirs
  :PROPERTIES:...

** Dominique Wolton - Penser la communication
  :PROPERTIES:...

**  -
  :PROPERTIES:...

** Dujarier, Marie-Anne - Le management désincarné: enquête sur les nouveaux cadres du travail
  :PROPERTIES:...

**  -  Travail, salaire, profit
  :PROPERTIES:...

** Alice Mazeaud and Magali Nonjon - Le marché de la démocratie participative
  :PROPERTIES:...

** Pierre-Yves Guihéneuf, Lucie Anizon - Le marché de la démocratie participative : notes de lecture
  :PROPERTIES:...

**  Michel Schneider -  Aujourd'hui gouverner, c'est se faire voir
  :PROPERTIES:...

**  Soules, Marshall -  Harold {Adams} {Innis}: the bias of communications \& monopolies of power
  :PROPERTIES:...

** Christian Salmon - L\'ère du clash
  :PROPERTIES:...

**  Slavoj Žižek -  The Matrix, or, the Two Sides of Perversion
  :PROPERTIES:...

** de Malebranche, Nicolas - De la recherche de la vérité
  :PROPERTIES:...

** Régis Debray - L'erreur de calcul
  :PROPERTIES:...

**  - Retranscription du « grand débat des idées » à l'Élysée
  :PROPERTIES:...

** Luca Manucci - Ni droite ni gauche... ni centre
  :PROPERTIES:...

** Leo Szilard - The {M}ark {G}able {F}oundation
  :PROPERTIES:...

** Robert, Michel and Sallantin, Jean and Lionel Torres - Rétablir par le débat numérique la confiance et le respect dans le débat public
  :PROPERTIES:...

** Eric Hazan - {LQR} La propagande au quotidien
  :PROPERTIES:...

** Latour, Bruno and others - Enquête sur les modes d'existence : une anthropologie des modernes
  :PROPERTIES:...

** Michel Tournier - Robinson ou les limbes du Pacifique
  :PROPERTIES:...

** David Graeber - The iron law of liberalism and the era of total bureaucracy
  :PROPERTIES:...

**  - Appel à communication pour le Colloque international NumeRev
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** Edgar Morin - Sur l'interdisciplinarité
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** Patrick Boucheron - Ce que peut l’histoire
  :PROPERTIES:...

** John R. Searle - Minds, brains and programs
  :PROPERTIES:...

** Mickey Hart - Drumming at the Edge of Magic
  :PROPERTIES:...

** Introne, Joshua and Laubacher, Robert and Olson, Gary and Malone, Thomas - The {C}limate {C}o{L}ab: Large scale model-based collaborative planning
  :PROPERTIES:...

** Toplak, Jurij - Preferential Voting: Definition and Classification
  :PROPERTIES:...

** Warren D. SMith - Range Voting
  :PROPERTIES:...

** Slavoj Žižek - Violence
  :PROPERTIES:...

** Michel Meyer - L'Argumentation
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** Christian Plantin - L'argumentation
  :PROPERTIES:...

** Christian Plantin - L'argumentation
  :PROPERTIES:...

** Auguste Valencin - Regards
  :PROPERTIES:...

**  Paul Robert, Bernard Pottier -  Dialogues : Faut-il brûler les dictionnaires ?
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** Jean-Claude Michéa - Notre ennemi, le capital
  :PROPERTIES:...

** Jean-Claude Michéa - Le Loup dans la bergerie
  :PROPERTIES:...



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